Crise de l’énergie : le Sénat fustige la gestion du gouvernement
Le 27 juin, la Commission des finances a rendu publique sa « mission de contrôle budgétaire sur les dispositifs de soutien aux consommateurs d’énergie ». La Commission pointe, dans son rapport, « la communication confuse », « l’improvisation » et le « retard à l’allumage » du gouvernement.
Un bouclier tarifaire peu efficace
Entre 2021 et 2023 ce ne sont pas moins de 85 milliards d’euros qui ont été dépensés par les pouvoirs publics afin de soutenir les entreprises et les ménages face à la crise énergétique, à travers divers mécanismes d’aides.
Près de 48% des aides (40 milliards d’euros) ont été alloués au seul bouclier tarifaire (TRVE). Cette initiative a permis de traiter la crise dite des « boulangers » en maitrisant l’envolée de la facture des artisans et des très petites entreprises. Le bouclier a surtout contenu la hausse des abonnés aux TRVE à 4% en 2022 et 15% en 2023. 7 milliards d’euros de soutien ont été distribués aux entreprises les plus consommatrices d’énergie ; 8 milliards aux automobilistes face aux prix du carburant ; 3 milliards aux ménages les plus modestes.
Pourtant, selon Christine Lavarde, rapporteuse spéciale de la Commission et sénatrice des Hauts-de-Seine, ce dispositif ne s’est pas montré efficace.
Le plafonnement prolongé des tarifs de l’électricité a entrainé un manque à gagner fiscal de 18 milliards d’euros. Quant aux recettes, elles ont été surestimées, comme celles liées à la taxe CSPE où les producteurs d’énergies renouvelables ont reversé 15 milliards des 30 milliards anticipés dans la loi de finance 2023.
« Une méconnaissance des consommateurs d’énergie »
Christine Lavarde fustige le manque de réactivité de l’exécutif au cœur de la crise de l’énergie. Les aides apportées aux entreprises sont arrivées tardivement, les obligeant à des avances de trésorerie considérables. « Les auditions que nous avons menées ont mis en évidence une méconnaissance des consommateurs d’énergie (…) l’Etat avance à l’aveugle », dénonce la sénatrice des Hauts-de-Seine.
Ensuite, la Commission pointe du doigt « l’usine à gaz » des aides et des boucliers, critiquant les timings – par exemple, le décalage de déclenchement et de clôture des boucliers gaz et électricité – ou les effets indésirables de certaines mesures : « Les dispositifs n’ont pas eu pour effet d’inciter les consommateurs à diminuer leur consommation. Certains ont même conduit à neutraliser des incitations existantes ».
Le Sénat offre donc un jugement final négatif de l’action du gouvernement, la jugeant improvisée et incohérente : « Dans l’ensemble, ces décisions se caractérisent par une grande impréparation et une communication très hétérogène, qui ont engendré des décisions parfois ubuesques ».
Le Sénat préconise de conserver le bouclier tarifaire du gaz
La rapporteuse s’interroge : « Pourquoi s’empresser de supprimer le bouclier tarifaire du gaz, alors que ce dispositif ne coûte rien puisqu’il se déclenche automatiquement dans le pire des cas et représente une sécurité face à une nouvelle poussée des tarifs gaziers ? ».
La sénatrice exhorte donc le gouvernement à définir une stratégie claire en cas de nouvelle flambée des prix du gaz. A l’inverse, le bouclier sur l’électricité qui est maintenu jusqu’à 2025 devra être révisé si les cours venaient à stagner, sachant que les prix sont inférieurs à ceux de 2022.
Enfin, la Commission demande à l’exécutif d’aider les entreprises ayant signé des contrats de plus d’un an de fourniture, à des tarifs très élevés.