EDF devra adapter les centrales nucléaires au réchauffement climatique
Lors de ses vœux à la presse, en janvier dernier, l’Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN) alertait sur la nécessité d’anticiper les effets du réchauffement climatique sur les installations nucléaires. Elle exhorte notamment EDF à revoir ses plans.
Les enjeux liés au réchauffement climatique
En France, les 56 réacteurs des 18 centrales pompent de l’eau pour assurer leur refroidissement, avant de rejeter de l’eau, légèrement plus chaude. Pour ce faire, le débit des cours d’eau doit être suffisant. Si le débit est trop faible alors, les eaux doivent être stockées dans des cuves non extensibles et, à terme, les réacteurs mis à l’arrêt.
Or, du fait du réchauffement climatique et la multiplication des températures élevées, les circonstances sont de moins en moins réunies pour assurer un fonctionnement des réacteurs, selon ce protocole. Pourtant, des dérogations ont été octroyées du 6 août au 11 septembre 2022, permettant à 5 centrales de rejeter des eaux plus chaudes afin de maintenir leur production d’électricité.
EDF sous pression pour adapter les centrales nucléaires
Beaucoup, à commencer par les associations écologistes, s’étaient émus de cette clémence exceptionnelle. « Ce n’est pas acceptable qu’EDF obtienne de telles dérogations », avait protesté France Nature Environnement sur son compte Twitter.
L’ASN, incitait EDF à étudier des systèmes de refroidissement moins consommateurs d’eau pour les futurs EPR2.
La Cour des comptes, elle, enjoignait l’énergéticien à prendre des mesures supplémentaires pour augmenter les capacités de stockage et ainsi, permettre d’éviter les rejets d’eau chaude lorsque le débit est faible.
Enfin, le 30 mars dernier, le Président de la République encourageait à mettre en place « un vaste programme d’investissement pour faire des économies d’eau et permettre de fonctionner beaucoup plus en circuit fermé », lors de la présentation de son « Plan eau ».*
EDF se défend puis, promet d’agir
Dans un premier temps, EDF a tenté de se défendre, en exprimant ce qui semblait être une remise en cause des critères de précaution : « techniquement, on pourrait fonctionner avec des températures beaucoup plus élevées que celles que l’on rencontre en période de fortes canicules ou dans des situations où il y a peu d’eau », rétorquait Cécile Laugier (Directrice environnement et prospective à EDF), à l’été 2022.
Plus récemment, Cécile Laugier a exprimé sa réticence face à la proposition du Président Macron : « cela nécessiterait des modifications de très grande ampleur, qui coûteraient cher et amèneraient la centrale à ne pas produire d’électricité pendant longtemps ».
Lors d’une conférence de presse, le 16 mai, EDF a fait montre de bonne volonté en assurant vouloir mettre en place plusieurs projets pour anticiper les enjeux liés au réchauffement climatique.
Tout d’abord, l’énergéticien garantit d’effectuer un état des lieux et un diagnostique très complet des consommations d’eau des centrales. Des réservoirs supplémentaires seront installés sur le site de Civaux (Vienne) et dans d’autres centrales, pour stocker les effluents quand les températures sont trop élevées.
Ensuite, EDF va mettre en place une veille technologique afin d’observer les avancées en termes d’installations nucléaires aux Etats-Unis, Emirats Arabes Unis et Afrique du Sud- pays où les centrales fonctionnent dans des conditions très arides.
Enfin, EDF dit vouloir tester, d’ici fin 2023, une innovation des chercheurs du MIT permettant de récupérer de la vapeur d’eau dans le panache des tours aéroréfrigérantes, par le biais de panneaux produisant de l’électricité statique. Le test se réalisera sur la centrale du Bugey, à Saint-Vulbas.