Plafond des prix du gaz : l’industrie de l’énergie UE monte au front
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La hausse des prix du gaz ravive les tensions
Les prix du gaz en Europe ont connu une forte poussée, atteignant 58 euros/MWh ce lundi 10 février (TTF néerlandais, indice de référence européen pour le gaz naturel), leur niveau le plus élevé depuis avril 2023. Cette hausse est alimentée par des températures hivernales rigoureuses, une baisse des réserves de gaz et les tensions économiques liées à la guerre commerciale entre les États-Unis et l’Europe .
Bien que ces tarifs soient loin du pic de la crise énergétique d’août 2022 (339 euros/MWh), ils restent deux fois plus élevés qu’il y a un an, ce qui place l’Europe dans une position délicate face à ses concurrents américains et chinois.
Le plafonnement des prix : une mesure sous tension
Face à cette situation, la Commission européenne envisage un plafonnement temporaire des prix du gaz pour soulager les entreprises et les consommateurs. Ce mécanisme, déjà évoqué par Mario Draghi dans son rapport sur la compétitivité, pourrait être intégré dans le Clean Industrial Deal, attendu pour le mois prochain. L’idée : activer des plafonds dynamiques en cas de divergence trop importante entre les prix européens et mondiaux.
Mais cette proposition suscite une vive opposition des industriels européens. Dans une lettre envoyée à Ursula von der Leyen , onze organisations majeures, dont Eurogas , Energy Traders Europe , et Europex , alertent sur les risques d’une telle mesure : « Nous pensons que cette mesure, si elle était annoncée, pourrait avoir des conséquences négatives considérables sur la stabilité des marchés énergétiques européens et sur la sécurité d’approvisionnement à travers le continent » expliquent les acteurs.
Ils redoutent ainsi plusieurs conséquences :
- Perte de compétitivité : un plafonnement des prix du gaz nuirait à la confiance dans le TTF, principale place de marché européenne pour la fixation des prix du gaz. Cela pousserait « la communauté gazière mondiale à se tourner vers d’autres indices de référence, non contraints, et donc plus représentatifs, situés principalement en dehors de l’UE ».
- Risque sur la sécurité d’approvisionnement : en limitant artificiellement les prix, l’Europe pourrait peiner à attirer les cargaisons de gaz naturel liquéfié (GNL) sur un marché mondial très concurrentiel.
- Baisse des investissements : l’incertitude réglementaire pourrait freiner les investissements dans les infrastructures énergétiques.
Un débat stratégique pour l’avenir énergétique de l’Europe
Ce n’est pas la première fois que l’UE envisage un tel dispositif. En 2022 , un plafond des prix devait s’activer si le gaz dépassait 180 euros/MWh pendant trois jours consécutifs, avec un écart de 35 euros/MWh par rapport aux prix mondiaux. Mais cette mesure n’a jamais été déclenchée et a expiré récemment.
Certaines exceptions avaient toutefois été accordées : l’Espagne et le Portugal avaient obtenu le feu vert de la Commission pour imposer un plafonnement temporaire des prix du gaz et du charbon destiné aux centrales électriques.
Alors que la Commission européenne prépare un nouveau paquet de mesures pour renforcer la compétitivité industrielle, prévu le 26 février , le sujet reste hautement sensible. Les avis divergent au sein des États membres. Le précédent plafonnement des prix du gaz dans l’UE avait d’ailleurs été contesté par l’industrie et par les gouvernements nationaux, notamment l’Allemagne et les Pays-Bas, qui avaient mis en garde contre le fait qu’il entraverait la capacité de l’Europe à décrocher des approvisionnements en carburant.