France: la Cour des comptes demande une stratégie claire face au changement climatique
La Cour des comptes française s’est félicitée mardi d’une « prise de conscience » de l’urgence de s’adapter au changement climatique, mais a demandé à l’État de jouer plus clairement son rôle de stratège et de mieux chiffrer les efforts budgétaires nécessaires.
La France doit préciser sa politique climatique
« Le message de la Cour, c’est qu’il faut faire plus pour l’adaptation climatique », a déclaré le premier président de l’institution, Pierre Moscovici, en présentant à la presse son rapport annuel.
« Nous constatons un kaléidoscope de réponses, de plus ou moins grande qualité », a relevé l’ancien commissaire européen aux Affaires économiques et financières. Mais elles « ne sont pas articulées, d’où l’impératif de planifier ».
« Dans certains domaines, l’État ne joue pas correctement son rôle de stratège, qui consiste notamment à fixer des objectifs et à définir une trajectoire pour les atteindre », regrettent les magistrats.
C’est la première fois que cette thématique de l’adaptation fait l’objet d’un rapport spécifique de la Cour, signe de l’importance qu’elle a prise, après avoir longtemps été occultée par les efforts nécessaires pour réduire les émissions de gaz à effet de serre.
Le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, a jugé mardi que les propositions du rapport permettraient d' »éclairer les arbitrages sur les options de financement les plus pertinentes sur l’adaptation .»
Mais « l’Etat ne peut pas tout » a ajouté le ministre dans une tribune au journal Libération. « L’adaptation concerne nos modes de vie, notre quotidien, nos vacances et notre travail, notre façon de bâtir et de nous nourrir. (…) C’est donc aussi un défi démocratique », a-t-il déclaré, annonçant le lancement « dans quelques jours » d’une consultation publique sur la stratégie française d’adaptation.
La Cour des comptes souhaite des objectifs chiffrés
Le gouvernement français souhaite se montrer plus réaliste en retenant l’hypothèse d’un réchauffement de 4°C en France d’ici la fin du siècle, servant de base pour le troisième Plan national d’adaptation au changement climatique, attendu au début de l’été.
La Cour appelle notamment les autorités à « corriger » des insuffisances en matière de planification, relevant des incohérences par exemple sur l’adaptation de l’immobilier ou du tourisme en montagne.
L’association Oxfam a salué un rapport qui arrive « à un moment crucial ». Les fonds d’aides proposés par la Cour constituent des « pistes intéressantes » mais devraient « être abondés par les responsables de la crise climatique » estime l’ONG.
A l’heure des économies budgétaires – 10 milliards d’euros en 2024 puis 20 milliards en 2025 – la Cour réclame aussi un chiffrage clair des mesures d’adaptation, forcément onéreuses.
L’Institut de l’économie pour le climat (I4CE) a estimé à au moins 2,3 milliards par an les quelques mesures d’adaptation « incontournables » à prendre dès maintenant, sachant qu’il y aura ensuite d’autres besoins au coût « potentiellement bien plus important ».
Problème: la situation des finances publiques est « préoccupante » voire « sérieuse » met en garde la Cour, qui y consacre une partie de son rapport.
Mais même dans ce contexte délicat, Pierre Moscovici défend les dépenses en faveur de l’environnement: « Il serait paradoxal d’aller taper dans le secteur sur lequel on a le plus besoin d’investissement ».
(© Agence France-Presse)