La France plaide pour une reconnaissance de l’énergie nucléaire, qu’elle considère comme un pilier essentiel de la décarbonation.
La Commission européenne s’apprête à dévoiler sa feuille de route pour atteindre une réduction de 90 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2040.

La France refuse une nouvelle hausse des objectifs en matière d’énergies renouvelables et plaide pour une reconnaissance équivalente de l’énergie nucléaire, qu’elle considère comme un pilier essentiel de la décarbonation.

Une directive « énergie décarbonée » plutôt qu’une directive sur les renouvelables

En pleine négociation du plan climatique 2040 de l’Union européenne, la France hausse le ton. Alors que la Commission européenne s’apprête à dévoiler sa feuille de route pour atteindre une réduction de 90 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2040 (par rapport à 1990), la France fait entendre sa voix. Elle refuse que soit relevé l’objectif européen de déploiement des énergies renouvelables, tel qu’adopté en 2023, et demande que l’énergie nucléaire soit reconnue au même titre que l’éolien ou le solaire.

Dans une note transmise fin avril à Bruxelles, révélée par Les Échos, les autorités françaises posent leurs conditions. Elles exigent que « l’objectif 2040 s’accompagne d’un objectif de réduction de l’intensité carbone de l’énergie finale consommée, en lieu et place d’un objectif EnR européen ». La France estime qu’une directive « énergie décarbonée », remplaçant la directive actuelle sur les renouvelables, permettrait mieux d’atteindre les objectifs climatiques ambitieux. Cette position reflète une tension récurrente entre Paris et Bruxelles. La France, dont le mix électrique repose largement sur l’énergie nucléaire — elle est le pays le plus nucléarisé au monde par habitant, avec 56 réacteurs pour 68 millions d’habitants — revendique une stratégie de décarbonation déjà efficace. Cependant, elle reste en retard sur ses propres objectifs de développement des renouvelables, ce qui renforce sa volonté de faire reconnaître ses spécificités nationales.

42,5% Soit la part des énergies renouvelables dans la consommation énergétique européenne d’ici 2030, selon les objectifs de la directive européenne sur les EnR.

Une décision finale « avant l’été »

La directive européenne sur les énergies renouvelables, adoptée en octobre 2023, fixe un objectif de 42,5 % de renouvelables dans la consommation énergétique européenne d’ici 2030. La Commission pourrait être tentée d’augmenter cette ambition pour l’horizon 2040, mais une telle révision nécessiterait l’unanimité des 27 États membres — un consensus difficile à atteindre, particulièrement face aux réserves françaises.

Depuis plusieurs années, la France mène une campagne active pour faire du nucléaire un pilier officiel de la transition énergétique européenne. Elle est à la tête de l’« alliance européenne du nucléaire », un groupe d’une douzaine de pays favorables à l’atome. Ce front pro-nucléaire se heurte toutefois à l’opposition de certains États membres, dont l’Allemagne, qui restent sceptiques sur le rôle de cette énergie dans la transition écologique.

La décision finale, désormais attendue « avant l’été », sera déterminante : elle conditionnera la feuille de route climatique que l’UE doit présenter à l’ONU à la COP30, en novembre prochain à Belém, au Brésil. Pour Paris, l’enjeu est clair : faire reconnaître sa stratégie nucléaire comme un atout dans la lutte contre le changement climatique, et non comme un obstacle aux ambitions européennes.

Giovanni Djossou, journaliste spécialisé
Giovanni Djossou Journaliste spécialisé

Titulaire d’un Master II en journalisme, Giovanni DJOSSOU a œuvré en tant que journaliste de presse écrite dans différents journaux et magazines pendant plus d’une décennie.
Spécialisé dans le secteur de l’énergie depuis 2023, il a la charge de la rédaction d’articles, de la conduite d’interviews ainsi que de la création de programmes pour Opéra Energie.