Energie : un marché toujours aussi incertain
En 2021, la hausse des prix de l’énergie, d’une ampleur inédite, est venue chambouler les marchés et renverser toutes les prédictions : multiplication par 6 des prix du gaz, hausse de 400% des cours de l’électricité, envolée de 40% du baril de Brent…
Il est encore bien trop tôt pour penser la tempête passée tant de nombreuses incertitudes demeurent, structurelles comme conjoncturelles. Tour d’horizon des points de vigilance.
Des capacités de production nucléaire sous tension
L’envolée des prix du gaz et du CO2 a largement pesé sur les cours de l’électricité.
Un autre facteur de hausse est aussi à chercher du côté de la trop faible disponibilité des centrales nucléaires. Non seulement la pandémie a contrarié le calendrier de maintenance du parc de production nucléaire mais en plus EDF se voit confronté à une corrosion inattendue de certains de ses réacteurs.
A l’heure actuelle, sur les 56 réacteurs nucléaires du parc français, 10 sont ainsi à l’arrêt, dont 5 des plus puissants. L’Électricien a annoncé une révision à la baisse de sa production nucléaire pour 2022 à 300-330 TWh, contre 330-360 TWh prévus.
Mercredi 19 janvier, l’ASN a ainsi rappelé que le système électrique du pays ne disposait plus de marges en matière de production, alors que l’hiver bat son plein.
Le Cal- 2023 termine la semaine dernière en hausse de 3 €/MWh à 131,34 €/MWh.
ARENH : la relève temporaire du plafond permettra-t-elle vraiment de pallier la hausse des prix ?
La commande ARENH pour 2022 est ressortie à 160.05 TWh soit un taux d’écrêtement de 37.52%. Les marchés ayant explosé début décembre, le surcoût lié à l’écrêtement pour les offres ARENH pourrait dépasser les 40 €/MWh pour de nombreuses entreprises.
Le 13 janvier, pour limiter l’impact et sécuriser son bouclier budgétaire, le gouvernement annonce qu’EDF devra vendre 20 TWh d’électricité nucléaire supplémentaires aux fournisseurs alternatifs, à 46,20 €/MWh, vs 42 euros €/MWh.
Cependant, des flous persistent. Les modalités d’application restent à être fixées, EDF évoque un rattrapage pour 2023 quand Bercy dit le contraire et rien n’est acté pour un relèvement définitif du plafond, ni pour l’après ARENH (le dispositif s’éteindra en 2025).
Des stocks de gaz bas
Un meilleur approvisionnement en GNL, une demande ralentie en Asie et la reprise de la production norvégienne ont permis aux cours du gaz de souffler quelque peu en ce mois de janvier. Mais l’équilibre est précaire, avec un taux de remplissage des réserves de gaz européennes aux alentours de 40 %. Un épisode de grand froid, des prix asiatiques en hausse venant détourner les méthaniers des côtes européennes ou un quelconque souci technique sur un champ gazier pourraient rapidement inverser la tendance. Sans compter les tensions géopolitiques entre Moscou et Kiev.
Le Cal-23 traite à 44,70 €/MWh le 21 janvier 2022. Le 21 janvier 2021, le Cal N + 1 traitait à 16,68 €/MWh.
Les cours du gaz, otage de la crise russo-ukrainienne
40 % des importations de gaz de l’Europe proviennent de Russie. Un approvisionnement qui pourrait être mis à mal en cas d’attaque de l’Ukraine par la Russie. Les Etats-Unis comme l’Europe brandissent en effet la menace de sanctions économiques si Moscou venait à passer à l’action. Déjà, le gazoduc Nord Stream 2, dont la certification est suspendue, est mis dans la balance par Berlin.
CO2, le prix de la transition énergétique
Le prix des permis d’émission de CO2 sur le marché européen n’en finit plus d’enchainer les records. Polluer coûte donc plus cher, ce qui est une bonne nouvelle à l’heure de l’urgence climatique.
Cependant, l’envolée du carbone renchérit les prix du gaz comme ceux de l’électricité, puisque c’est le coût marginal de la dernière centrale mise en service pour la production d’électricité qui fixe le prix.
Cette dynamique haussière tombe on ne peut plus mal dans le contexte actuel. Pour autant, compte tenu des engagements européens en faveur du climat, elle ne devrait pas s’inverser.