La transition énergétique s'accélère en France et le coût du soutien aux EnR flambe temporairement. Une situation provisoire ?
Les dépenses de l'Etat liées aux énergies renouvelables devraient atteindre les 7,6 milliards d'euros en 2026.

Alors que la transition énergétique s’accélère en France, le coût du soutien aux énergies renouvelables flambe temporairement. Un investissement de l’État qui suscite des tensions politiques, mais que les autorités régulatrices assurent être transitoire.

Dépenses : de 2,9 milliards en 2024 à 6,2 milliards en 2025

Après avoir rapporté 5,5 milliards d’euros à l’État en 2022 et 2023 grâce à des prix de l’électricité très élevés, les énergies renouvelables pèsent à nouveau lourdement sur les finances publiques. En effet, avec le recul des prix du marché, l’État est désormais contraint de compenser les écarts tarifaires garantis dans les contrats passés avec les producteurs, notamment ceux signés dès 2008 pour soutenir les débuts du solaire et de l’éolien.

Ces anciens contrats, particulièrement avantageux – jusqu’à six fois plus rémunérateurs que ceux d’aujourd’hui – arrivent encore à échéance, alimentant une facture publique en forte hausse. D’après la Commission de régulation de l’énergie (CRE), les dépenses de l’État liées aux énergies renouvelables passeront de 2,9 milliards d’euros en 2024 à 6,2 milliards en 2025, puis à 7,6 milliards en 2026, incluant également les centrales à biomasse. Comme le souligne Rachid Bouabane-Schmitt, secrétaire général de la CRE, « si ces coûts sont en hausse pour les finances publiques, c’est parce que les volumes d’énergie produits le sont également : 72 térawattheures en 2020, 81 en 2025 et 90 attendus l’an prochain ».

60 % Soit la part des dépenses pour le photovoltaïque dans les dépenses publiques totales prévues pour 2025 (3,7 milliards des 6,2 milliards d’euros).

Le photovoltaïque dans le viseur

La filière photovoltaïque représente à elle seule 3,7 milliards d’euros de dépenses prévues pour 2025, puis 4,3 milliards en 2026. Ce poids financier en fait une cible privilégiée de certaines forces politiques. Le gouvernement, après la pression de plusieurs groupes politiques a décidé au printemps de freiner le développement du photovoltaïque. Le groupe public, pourtant engagé dans les renouvelables, juge l’intermittence du solaire incompatible avec son plan de relance du nucléaire.

L’éolien terrestre suit la même tendance, avec une charge en hausse de 929 millions à 1,3 milliard d’euros entre 2025 et 2026. S’y ajoutent le soutien aux centrales à biomasse (754 à 848 millions) et au biométhane (1,3 milliard), produit à partir de déchets organiques.

En pleine rigueur budgétaire, ces chiffres cristallisent les tensions. Bruno Retailleau, ministre de l’Intérieur, a récemment réclamé « l’arrêt des subventions aux filières éolienne et solaire », déclenchant l’ire du président Emmanuel Macron.

Un positionnement qui tranche avec celui d’anciens ténors du parti, comme Michel Barnier, qui prônait dans sa programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) un développement plus modéré mais continu des renouvelables.

La CRE assure une baisse des coûts et un bénéfice pour le consommateur, à terme

Malgré cette envolée temporaire des coûts, la CRE se veut rassurante. Ces dépenses publiques sont amenées à diminuer progressivement, à mesure que les anciens contrats onéreux expirent. « Le coût du soutien à l’électricité renouvelable est appelé à baisser d’ici à quelques années », affirme Rachid Bouabane-Schmitt. Il rappelle que les prix de rachat ont chuté, passant de plus de 300 € le mégawattheure dans les années 2008 à moins de 50 € pour les derniers contrats offshore.

Autre élément de contexte favorable : la production électrique renouvelable permet à la France d’augmenter ses exportations d’électricité, générant ainsi 5 milliards d’euros en 2024. Elle contribue également à la réduction du recours aux énergies fossiles, qui représentent encore 60 % de l’énergie consommée en 2023.

Enfin, si l’État compense aujourd’hui les producteurs, c’est parce que les prix de gros de l’électricité sont bas — un avantage indirect pour le consommateur. « L’État doit dédommager les énergéticiens, mais cela signifie aussi que le consommateur paie moins cher son électricité », insiste Rachid Bouabane-Schmitt.

La hausse actuelle de la facture des énergies renouvelables doit être envisagée comme une phase transitoire dans la transformation du paysage énergétique français. Entre soutien budgétaire, arbitrages politiques et retombées économiques, l’enjeu est autant financier qu’écologique.

Giovanni Djossou, journaliste spécialisé
Giovanni Djossou Journaliste spécialisé

Titulaire d’un Master II en journalisme, Giovanni DJOSSOU a œuvré en tant que journaliste de presse écrite dans différents journaux et magazines pendant plus d’une décennie.
Spécialisé dans le secteur de l’énergie depuis 2023, il a la charge de la rédaction d’articles, de la conduite d’interviews ainsi que de la création de programmes pour Opéra Energie.