Environnement, fiscalité et action publique : l’opinion des Français
Alors que les préoccupations pour l’environnement semblaient jusqu’à présent occuper une place de plus en plus importante dans l’opinion publique, le contexte économique et social morose de 2024 a fait reculer cet enjeu.
La crise sociale et économique prend le pas sur la crise climatique
D’après une enquête menée par l’ADEME en partenariat avec le CREDOC, le souci environnemental, qui se classait encore en 2023 en deuxième position parmi les principales préoccupations des Français, occupe désormais la quatrième place (25%, soit une baisse de 6 points).
Des sujets comme la violence et l’insécurité (45%, +7pts), l’immigration (32%, +8pts) et la pauvreté (26%, -1pt) sont désormais prioritaires.
Pour autant, les Français restent largement conscients des enjeux climatiques. Ils sont ainsi majoritairement favorables (82 %) à un effort budgétaire comparable à celui déployé lors de la pandémie de Covid-19 pour combattre le réchauffement climatique.
En attente d’un meilleur fléchage des recettes fiscales
L’enquête révèle également que 44 % des Français se disent toujours opposés à toute augmentation d’impôts, quel qu’en soit l’objectif.
« Mais pour la première fois depuis le lancement de ce baromètre en 2020, cette proportion est en baisse (-9pts depuis 2023). » note l’ADEME.
Parmi ceux qui acceptent l’idée d’une hausse des impôts, les priorités de financement concernent en premier lieu la santé (29 %), suivie de l’éducation (19 %) et de la vieillesse (17 %). L’environnement, bien que présent, n’arrive qu’en quatrième position avec 15 %.
Une adhésion aux règles collectives
La question des comportements individuels face à l’urgence environnementale reste divisée.
Si 60 % des Français sont favorables à l’idée de règles collectives pour limiter les comportements nocifs à l’environnement, même si cela implique des restrictions dans leurs choix de consommation (comme choisir certains modèles de voiture, prendre l’avion, changer souvent d’équipements électroniques…), cette proportion est en baisse.
A l’inverse, « 38% (+7pts) souhaitent que les choix de consommation individuels soient préservés, même si c’est au dépend de l’environnement. »
Les Français réclament « un système plus juste et plus efficace »
Une large majorité des Français (76 %) estime être perdante face au système socio-fiscal actuel.
Pour rétablir une fiscalité jugée plus juste et efficace, ils sont nombreux à proposer de taxer davantage les hauts revenus (30 %), de supprimer certaines niches fiscales (26 %), ou encore de demander à l’ensemble des citoyens de contribuer à l’impôt sur le revenu, même de manière symbolique (24 %).
En revanche, seuls 19 % des sondés considèrent que la justice fiscale devrait se traduire par une baisse généralisée des impôts et des taxes.
Un niveau d’acceptabilité de la fiscalité environnementale historiquement bas
Concernant le financement de la transition climatique, les Français plaident pour un effort proportionné aux capacités de chacun.
Ainsi, 68 % d’entre eux privilégieraient une hausse des impôts sur le patrimoine des 10 % des ménages les plus riches, et 66 % soutiendraient un impôt progressif sur les bénéfices des entreprises.
En comparaison, 35 % se disent favorables à une augmentation progressive de l’impôt sur le revenu, tandis que 22 % envisagent un recours à la dette publique.
Selon Patrick Jolivet, directeur « Transition Juste » à l’ADEME, cette étude invite donc à relativiser « ras-le-bol fiscal » des Français : « Près de la moitié des personnes refusant de prime abord une fiscalité sur les carburants pourrait changer d’avis selon l’usage qui est fait des recettes, principalement vers une redistribution monétaire, soit en faveur des ménages de catégories modestes et moyennes, soit sous la forme de baisse d’autres impôts bénéficiant à tous. »