Longtemps symbole du dynamisme des énergies renouvelables, l’éolien offshore subit aujourd’hui de plein fouet les retournements politiques, les goulets d’étranglement industriels et les incertitudes économiques.
« Des perspectives de croissance plus faibles de l’ordre de 27 % par rapport à 2023 »
Les signaux d’alerte s’accumulent dans le baromètre annuel de l’AIE. Comme nous vous l’annoncions dans nos colonnes, le 7 octobre, l’organisation estime désormais que la capacité mondiale des énergies renouvelables ne sera multipliée « que par 2,6 entre 2022 et 2030 », au lieu d’un triplement comme convenu à la COP28 de Dubaï. « Le vent est en train de tourner pour les énergies renouvelables », confirme l’agence dans son rapport publié mardi. En cause, « les changements de politique, de réglementation et de marché » observés dans les deux plus grands pôles du secteur, la Chine et les États-Unis.
Si Pékin demeure le moteur de la transition avec 60 % de la croissance mondiale et cinq ans d’avance sur ses objectifs 2035, la Chine a restreint les conditions de rachat de l’électricité verte, rendant nombre de projets moins rentables. Outre-Atlantique, le constat est encore plus sévère : l’AIE révise à la baisse de 50 % ses prévisions pour les États-Unis, minées par la croisade du président Donald Trump contre l’éolien offshore, qu’il accuse sans fondement de « tuer les baleines et de provoquer des cancers ».
Selon l’agence, « l’éolien offshore se distingue [des autres énergies renouvelables] par des perspectives de croissance plus faibles, de l’ordre de -27 % par rapport à 2023, en raison des changements politiques, des goulets d’étranglement dans la chaîne d’approvisionnement et de la hausse des coûts ».
L’Europe dans la tempête : appels d’offres annulés et filière française fragilisée
Les incertitudes politiques et économiques pèsent lourdement sur les projets européens. Plusieurs appels d’offres majeurs ont été annulés, faute de candidats, notamment deux en Allemagne, trois au Danemark et deux en Inde totalisant 4,5 GW, souligne l’AIE. En France, l’appel d’offres pour le futur parc de l’île d’Oléron a été déclaré infructueux. En Normandie, seuls EDF et TotalEnergies – désormais sans son partenaire RWE – se sont positionnés pour le projet Centre Manche 2.
La filière hexagonale attend toujours le neuvième appel d’offres, dont le cahier des charges n’a pas été publié, tandis que le dixième, de 8 à 9 GW, reste suspendu à la nouvelle stratégie énergétique nationale, toujours en attente. Cette paralysie commence à se traduire sur le plan social. L’Observatoire des énergies de la mer fait état de 200 emplois perdus en 2024, ramenant l’effectif du secteur à 7 600 salariés. « La question de la préservation des outils industriels, des compétences et des emplois est désormais centrale », alerte Mattias Vandenbulcke, délégué général adjoint de France Renouvelables. Après un plan social chez GE Vernova en Loire-Atlantique et un autre en préparation chez RWE, l’ensemble du tissu industriel français se retrouve fragilisé.
Une lueur d’espoir demeure néanmoins : le géant danois Orsted a annoncé une augmentation de capital record de 8 milliards d’euros pour financer ses nouveaux projets, notamment aux États-Unis où 15 GW devraient être mis en service cette année — un bond de 60 % sur un an, porté par la Chine. Entre 2025 et 2030, les capacités installées mondiales pourraient encore atteindre 140 GW, soit deux fois plus que sur la période 2019-2024.
Source : Les Echos
Titulaire d’un Master II en journalisme, Giovanni DJOSSOU a œuvré en tant que journaliste de presse écrite dans différents journaux et magazines pendant plus d’une décennie.
Spécialisé dans le secteur de l’énergie depuis 2023, il a la charge de la rédaction d’articles, de la conduite d’interviews ainsi que de la création de programmes pour Opéra Energie.