la baisse des émissions de gaz à effet de serre en France continue de ralentir. Les signaux sont au rouge.

Malgré les engagements climatiques pris à l’échelle nationale et internationale, la baisse des émissions de gaz à effet de serre en France continue de ralentir. Les signaux sont au rouge, et les acteurs institutionnels comme associatifs pointent un essoufflement préoccupant de la transition écologique.

0,8 % de baisse

En 2025, la France ne devrait enregistrer qu’une baisse de 0,8 % de ses émissions de gaz à effet de serre, selon le premier bilan prévisionnel du Citepa, l’organisme chargé du suivi du carbone. Cette réduction correspond à seulement 3 millions de tonnes d’équivalent CO₂ (MtCO₂e) par rapport à 2024, pour un total annuel estimé à 366 MtCO₂e. Loin des réductions significatives attendues, ces chiffres traduisent une dynamique qui s’essouffle dangereusement. Le ralentissement était déjà amorcé en 2024 avec une baisse de seulement 1,8 %, après un recul de 6,8 % en 2023.

« Ces chiffres sont très mauvais et appellent à un sursaut collectif », a réagi la ministre de la Transition écologique, Agnès Pannier-Runacher, qui refuse d’abandonner l’élan engagé : « continuer à baisser nos émissions de gaz à effet de serre est non seulement indispensable, mais possible ». Elle dénonce également « la confusion du discours politique, les reculades, les propos irresponsables et populistes de certains sur la transition écologique », jugeant que « ce message de ‘stop and go’ est désastreux », comme elle l’a exprimé dans Le Monde.

Le ralentissement français s’inscrit dans une tendance plus large : l’Allemagne et le Royaume-Uni ont également vu leur réduction d’émissions s’essouffler, avec respectivement -3 % et -3,6 % en 2024, bien en deçà des années précédentes. Pour Anne Bringault, directrice des Programmes au Réseau Action Climat (RAC), cette situation est un signal d’alarme : « Il est ahurissant que l’année des 10 ans de l’Accord de Paris, et alors que les impacts du changement climatique s’aggravent, la France […] soit en train de stopper la baisse de ses émissions […] Ce n’est pas une fatalité, mais un choix politique ».

Secteurs à la traîne et efforts à intensifier

Le premier trimestre 2025 a vu une légère hausse des émissions (+0,2 %) portée notamment par un hiver plus froid, ayant provoqué une surconsommation de gaz pour le chauffage résidentiel et tertiaire (+5,2 %). Les réductions importantes observées dans la production d’énergie ces dernières années ralentissent fortement (-0,9 % attendu en 2025, contre -4 % en 2024).

Si certains secteurs comme l’industrie manufacturière et la construction devraient enregistrer des baisses (-2,4 %), elles seraient avant tout liées à la baisse de l’activité économique, selon l’Insee, plutôt qu’à des avancées structurelles dans la décarbonation. L’agriculture et la sylviculture devraient diminuer leurs émissions de 1,3 %, tandis que le secteur des transports reste stable, peinant à amorcer une réelle transition.

À l’échelle européenne, la Commission indique une baisse globale de 8,3 % des émissions en 2023, avec un recul de 37 % par rapport à 1990. Pourtant, l’objectif européen de réduction nette de 90 % d’ici 2040 semble difficilement atteignable sans accélération radicale.

Pour la France, l’objectif actuel de -40 % des émissions brutes d’ici 2030 par rapport à 1990 est en voie de révision : la prochaine stratégie nationale bas-carbone prévoit un objectif de -50 %, impliquant une baisse annuelle moyenne de 5 % entre 2022 et 2030. À titre de comparaison, les émissions françaises ont baissé de seulement 31 % depuis 1900.

La route reste donc longue, et les signaux d’alerte se multiplient. Le retard accumulé dans la transition énergétique pourrait s’avérer lourd de conséquences si les mesures structurelles ne sont pas rapidement mises en œuvre.

Source AFP

Giovanni Djossou, journaliste spécialisé
Giovanni Djossou Journaliste spécialisé

Titulaire d’un Master II en journalisme, Giovanni DJOSSOU a œuvré en tant que journaliste de presse écrite dans différents journaux et magazines pendant plus d’une décennie.
Spécialisé dans le secteur de l’énergie depuis 2023, il a la charge de la rédaction d’articles, de la conduite d’interviews ainsi que de la création de programmes pour Opéra Energie.