Le crédit d’impôt et le « plan d’épargne avenir climat », les armes de la réindustrialisation verte
Mi-mai, le président de la République (Le 11 mai, lors d’une rencontre avec les acteurs de l’industrie française) et le ministre de l’Economie (le 16 mai, lors du conseil des ministres) ont présenté le projet de loi « industrie verte » qui devra être discuté le 19 juin au Sénat et le 17 juillet à l’Assemblée nationale. Au sein de ce plan d’action, le crédit d’impôt et le « plan d’épargne avenir climat » ressortent.
Le crédit d’impôt
Il s’agit d’un investissement de 500 millions d’euros par an -soit 2 milliards d’euros d’ici la fin du quinquennat. Il qui représentera entre 20% et 45% des investissements dans différents secteurs verts : les panneaux photovoltaïques, les éoliennes, les batteries électriques, les composants, les pompes à chaleur et l’hydrogène vert. Ce crédit devrait être le point de départ d’un cercle vertueux déclenchant jusqu’à 20 milliards d’euros d’investissement d’ici 2030, et créant quelque 40 000 emplois, selon les prévisions de l’exécutif. Il faut noter que le déblocage de ce crédit s’effectuera au cas par cas.
Plan d’épargne avenir climat
L’épargne privée sera aussi mobilisée pour assurer la transition énergétique de l’industrie. « En cette période de difficulté budgétaire, il est impératif que le financement ne repose pas que sur les deniers publics », avait précisé Bruno Lemaire aux micros de BFM.
Si 4 milliards d’euros par an devraient être collectés grâce à l’assurance-vie et l’épargne retraite, 1 milliard issu du nouveau « plan d’épargne avenir climat » aideront le projet de transition. Ce plan d’épargne pourra être ouvert par les parents dès la naissance de l’enfant, jusqu’à ses 18 ans. Les fonds sont bloqués jusqu’à la majorité avec une garantie en capital, à la sortie. « Cela permettra de financer des projets de long terme », a indiqué le ministre de l’Economie. L’affectation de ces ressources supplémentaires se fera vers les PME vertes, les énergies renouvelables, la décarbonation de l’industrie ainsi qu’au profit du développement des entreprises innovantes.
Une stratégie à relativiser
Ce plan de réindustrialisation verte comporte aussi un investissement de 700 millions d’euros dans la formation. L’objectif est de former 50 000 ingénieurs par an d’ici le printemps 2027.
Enfin, des subventions seront mises en place. Bpifrance va débloquer 2,3 milliards d’euros sous forme de prêts directs ou de garanties de financement, pour la transition énergétique. L’octroi des subventions dépendra de la taille de l’entreprise, ainsi que de son impact carbone. Notons que les TPE ne sont pas comprises dans le dispositif.
Pourtant, ce plan d’action pourrait se révéler insuffisant. Dans une tribune au journal Le Monde, Pierre Veltz (membre de l’Académie des Technologies) et Grégory Rycha (directeur associé d’OPEO- cabinet de conseil en stratégie industrielle) apportent quelques bémols au projet du gouvernement.
D’abord, les deux experts remettent en question la notion même d’industrie verte. Pour eux, il s’agit d’un terme flou désignant un nombre trop limité de secteurs : « C’est l’industrie tout entière et tous secteurs confondus qui doivent devenir verts ». S’il faut prioriser la décarbonation des industries lourdes, c’est surtout une pensée à 360° qui doit se construire : « Il faut jouer sur tous les fronts : conception, marketing, design, fabrication, distribution, logistique et recyclage », pour assurer l’émergence de nouvelles valeurs de robustesse, de simplicité, de traçabilité et de maintenabilité des produits.
Ensuite, ce projet qui apparaît comme une réponse à l’IRA (Inflation Reduction Act) de l’administration américaine, est d’une trop faible envergure : « La réindustrialisation est un projet national là où il faudrait mettre en place un projet à l’échelle européenne », précisent les deux spécialistes.
Enfin, des doutes persistent sur les modes financements du projet et la crédibilité d’un impact budgétaire promis comme neutre. Affaire à suivre.