L’Europe doit accélérer ses investissements climat
L’Institut de l’économie pour le climat (I4CE), groupe de réflexion indépendant, a publié le premier rapport qui flèche de manière exhaustive les investissements publics et privés dans des secteurs économiques considérés comme essentiels pour atteindre les objectifs de décarbonation de l’UE : l’énergie, le bâtiment et les transports.
Le constat est sans appel : les investissements doivent doubler pour que l’UE atteigne les objectifs climatiques de 2030.
L’Europe est sur la bonne voie, mais doit investir plus et plus vite
En 2022, les investissements climatiques dans l’Union européenne ont connu une augmentation notable de 9%, une hausse qui valide la pertinence du Green Deal européen. Toutefois, malgré cette progression, le rapport souligne que les investissements dans la modernisation des secteurs de l’énergie, des transports et des bâtiments devront doubler pour que l’UE puisse atteindre ses objectifs climatiques pour 2030.
D’après l’étude, un montant d’au moins 813 milliards d’euros est en effet requis chaque année dans 22 secteurs économiques distincts pour répondre à l’objectif de décarbonation de l’UE, qui vise une réduction de 55 % des émissions nettes de gaz à effet de serre d’ici 2030 par rapport aux niveaux de 1990.
Or, « Les investissements dans l’économie réelle ont atteint 407 milliards d’euros en 2022. Par conséquent, le déficit d’investissement européen dans le domaine du climat s’élève à 406 milliards d’euros par an, soit 2,6 % du PIB ».
Un déséquilibre des investissements climatiques
« En examinant les 22 secteurs couverts par ce rapport, notre recherche souligne que dans seulement deux secteurs, l’hydroélectricité et le stockage électrique en batterie, les investissements climat de 2022 sont supérieurs aux besoins annuels d’investissement pour ces deux secteurs. Ces secteurs sont donc en situation de surplus d’investissements climat. » précisent les auteurs.
En revanche, les 20 autres secteurs présentent tous un déficit d’investissement climatique, avec des proportions variables. Ainsi, en 2022, les investissements dans l’énergie éolienne ne couvrent que 17 % des besoins annuels totaux en investissements, tandis que les investissements dans les panneaux solaires représentent déjà 78 % de ces besoins.
Or, combler le déficit d’investissement climatique dans certains secteurs critiques serait relativement simple. A titre d’exemple, pour les bornes de recharge publiques des véhicules électriques, un investissement supplémentaire annuel de seulement 4 milliards d’euros serait nécessaire.
L’Europe doit mettre en place un suivi annuel, complet et transparent
Le rapport appelle l’Europe à « mieux évaluer et traiter le déficit d’investissement climatique », au risque de voir les promesses économiques, sociales et environnementales du Green deal être compromises. I4CE insiste notamment sur :
- Une plus grande précision pour relever les défis liés à l’accès aux données, particulièrement dans le secteur des bâtiments. Le rapport préconise d’opter pour des méthodologies prudentes pour éviter la sous-estimation ou la surestimation du déficit.
- Une meilleure granularité, en encourageant l’utilisation de données nationales et régionales pertinentes pour mieux informer les politiques publiques locales et nationales. Cela permettrait d’adapter la méthodologie existante à des contextes économiques spécifiques.
- Un champ d’étude plus large : « notre rapport ne couvre que 22 secteurs dans les domaines de l’énergie, du bâtiment et des transports. En raison d’un manque d’accès à des données fiables, des secteurs critiques tels que l’industrie, l’agriculture et l’adaptation au changement climatique ne sont pas couverts par ce rapport. » explique I4CE.
Ce rapport sera présenté à Bruxelles ce mercredi, alors que les institutions européennes se préparent pour les élections de juin.