La France doit-elle craindre une pénurie de panneaux solaires ?
Julien Chirol, président de BayWa r.e. Solar Systems France, dans un entretien avec Le Monde de l’Énergie, fait part de ses inquiétudes quant à une éventuelle pénurie de panneaux solaires en France.
Les stocks de PV soulèvent des questions
De nombreux rapports signalent des stocks abondants au sein de l’UE. Des affirmations à prendre avec des pincettes pour Julien Chirol qui explique que l’absence d’organisme indépendant pour le suivi laisse place à des estimations possiblement exagérées.
Certes la production chinoise a inondé le marché européen, en réponse notamment à une demande croissante liées la guerre en Ukraine. Mais, selon Chirol, ces chiffres ne reflètent pas la réalité complexe des mouvements de stocks. Ils ne reflètent pas non plus les besoins spécifiques du marché français, qui ne trouve pas son compte dans la majorité des panneaux disponibles.
« Ces évaluations nous semblent biaisées : certains stocks sont comptabilisés plusieurs fois lorsqu’ils circulent d’un entrepôt à l’autre. Surtout, ils ne tiennent pas compte des spécificités du marché français : seule une minorité de panneaux y sont adaptés. » étaye-t-il.
La spécificité du marché français
Julien Chirol, met en lumière une inadéquation entre l’offre de panneaux solaires et les exigences spécifiques du marché français.
Pour les installations de taille moyenne à grande dépassant 100 kWc, la France impose un bilan carbone inférieur à 550 kg eqCO2/kWc, une norme respectée seulement par des panneaux spécifiquement conçus pour le marché français et certifiés par Certisolis. Par ailleurs, une particularité fiscale impacte le marché résidentiel : une TVA réduite est appliquée pour les installations inférieures à 3 kWc, orientant les installateurs vers des systèmes composés typiquement de sept panneaux de 425 Wc. « On aura donc peut-être des stocks abondants pour des panneaux de 72 cellules, P-type d’ancienne génération, de fabricants de deuxième ou troisième catégorie. Mais ce matériel sera commercialement mal adapté. » analyse Chirol.
Un contexte géopolitique qui met le marché sous tension
« Dans un contexte de prix baissiers, les installateurs ont eu tout intérêt, tant que les stocks restaient hauts, à acquérir leur matériel au dernier moment pour bénéficier des meilleurs prix. De nombreux projets des centrales au sol ont ainsi été décalés pour économiser sur l’achat de panneaux. » commente Chirol.
Or, les conflits maritimes en mer Rouge ont introduit des délais de livraison de 2 à 6 semaines supplémentaires pour l’Europe. Une telle situation pourrait entrainer une pénurie en France et, de surcroit, inciter à l’utilisation de panneaux solaires de moindre qualité.