« Comment gagner la bataille de la réindustrialisation ? » interroge Bpifrance Le Lab, à l’occasion de la présentation des résultats de son étude sur l’industrie et les territoires, réalisée avec le soutien de la Banque des Territoires.

Une étude inédite, proposant les regards croisés entre territoires, industriels et société civile

Cette étude s’appuie sur un dispositif exceptionnel, visant à comprendre le potentiel de développement industriel des territoires, en identifiant leurs atouts par rapport aux besoins des industriels, et en évaluant le rôle de la société civile. En tout, 2828 dirigeants industriels et 5000 citoyens ont été interrogés, plus de 200 personnes ont été interviewées, incluant des industriels, des élus, des représentants de l’État et des collectivités locales. De plus, 4 métropoles ont été visitées (Besançon, Châteauroux, Figeac, Valenciennes) et 306 zones d’emplois ont été étudiées à travers 27 bases de données publiques.

La réindustrialisation ne pourra se faire sans création d’emplois

« La marche pour atteindre la cible de réindustrialisation d’une balance commerciale manufacturière équilibrée est haute. Elle représente un défi en termes de créations d’emplois dans les territoires. » explique Bpifrance Le Lab.

Pour réindustrialiser et atteindre une part de l’industrie manufacturière dans le PIB de 12 % d’ici 2035 (contre 9,7 % en 2023), il faudra générer 233 milliards d’euros supplémentaires de valeur ajoutée manufacturière.

Cela suppose une forte accélération de la production industrielle, avec une hausse annuelle de 3,5 % en volume de la valeur ajoutée, hors effet inflation, au cours des dix prochaines années, comparée à une hausse de 1,5 % par an depuis la crise sanitaire. En tenant compte de l’inflation, une hausse annuelle de 5,3 % en valeur est attendue.

Ces pourcentages impliquent également un choc en termes d’emplois.

Selon les prévisions de croissance et de gains de productivité de Bpifrance Le Lab, la réindustrialisation nécessitera ainsi la création de 600 000 à 800 000 emplois nets d’ici 2035, soit entre 50 000 et 67 000 nouveaux emplois salariés par an entre 2023 et 2035 (contre une moyenne de 32 000 par an entre 2021 et 2023).

Il est à noter qu’actuellement 60 000 postes restent non pourvus chaque année (source : DARES), et que même si le système de formation produit 120 000 jeunes par an, seule la moitié d’entre eux reste dans l’industrie (source : Fabrique de l’industrie).

Entre 600 000 et 800 000 emplois industriels supplémentaires nécessaires pour atteindre la cible de 12 % du PIB en 2035.

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Il faut compter sur le tissu industriel existant

« Pour atteindre cette cible de réindustrialisation, le tissu industriel existant (avec des prévisions de croissance moyenne du chiffre d’affaires de l’ordre de 4% par an) représenterait 70% de la marche à franchir »  estime Bpifrance Le Lab.

Les 30% restants devront être réalisés par de nouveaux projets, français ou étrangers (soit une VA manufacturière de l’ordre de 71 Md€).

Les entreprises industrielles actuelles pourraient ainsi contribuer à environ 162 milliards d’euros de valeur ajoutée d’ici 2035, grâce à la croissance de leur activité.

Cette croissance proviendrait principalement de la diversification de l’offre de produits et de l’augmentation des volumes vendus, bien plus que de la montée en gamme et du développement à l’international.

Les Français imaginent une industrie aux multiples facettes, mais d’abord orientée vers la durabilité : orientée vers les énergies renouvelables (ENR) pour 41 % (contre 17 % pourles industriels), propre /verte / durable pour 40%. 

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Soutenir le potentiel des territoires

Tous les territoires ne peuvent pas ou ne veulent pas attirer tous les projets industriels. Cependant, chaque territoire offre un environnement unique pour les industriels.

Certains, marqués par la désindustrialisation et disposant de vastes terrains disponibles, ainsi qu’un vivier de main-d’œuvre significatif, ont déjà saisi les opportunités d’une renaissance industrielle.

D’autres préfèrent s’appuyer sur leur réseau de PME locales, qui sont solidaires et souvent plus résilientes face aux défis économiques. Enfin, certains territoires se découvrent des atouts industriels grâce à un cadre de vie attractif, des filières de formation d’excellence et des pôles de recherche capables d’attirer les meilleurs talents.

La majorité des projets industriels sont structurants pour le territoire qui les accueille

« Les industriels nous partagent 1703 projets d’implantation en France dans les années à venir (sur les 2828 répondants) : 1050 extensions de site (38% des répondants), 379 créations de nouvelles installations (14%), 45 relocalisations (3%), et 229 déménagements (8%). » détaille Bpifrance Le Lab. « A ces projets sur le sol français s’ajoutent 104 projets à l’étranger. »

Ces projets révèlent une dynamique de grande proximité, puisque 43 % des industriels souhaitent s’implanter près de leur usine actuelle et 22 % dans leur commune ou une commune voisine.

Cela reflète probablement un lien affectif au territoire, avec 86 % des industriels déclarant y être personnellement attachés, que ce soit parce qu’ils y ont grandi ou y ont fait leurs études.

Ce choix est également lié au bassin d’emplois et aux coopérations locales.

La cohésion de l’écosystème entrepreneurial, qui varie d’un territoire à l’autre, est selon l’étude un facteur difficilement mesurable mais essentiel. Contrairement aux idées reçues, les besoins des industriels se concentrent sur de petites surfaces foncières disponibles à proximité : 69 % des répondants ayant un projet de nouvelle implantation, notamment les PME et start-ups industrielles, nécessitent moins de 2 hectares.

Les Français soutiennent-ils la réindustrialisation ?


Les citoyens sont favorables à 82 % à la réindustrialisation en France, et 83 % considèrent que l’industrie française est « une fierté pour les territoires ». De plus, 40 % estiment que la France est en train de se réindustrialiser. Par ailleurs, 62 % des personnes interrogées pensent que l’industrie embauche, un chiffre qui monte à 75 % chez les travailleurs du secteur industriel. 87 % des personnes interrogées déclarent que l’industrie française produit des biens de qualité.

Cependant, lorsqu’il s’agit de leur propre consommation, le prix l’emporte largement sur la qualité ou le Made in France. Ainsi, la production française est le critère d’achat principal pour seulement 10 % des répondants (vs 38 % pour le prix) et figure dans le Top 3 des critères pour 31 % des personnes interrogées (vs 76 % pour le prix).

Le rapport met en lumière d’autres ambivalences, comme le rapport des Français aux industries de souveraineté nationale ou les industries lourdes.

S’ils sont nombreux à reconnaitre leur importance pour le pays, ils le sont encore plus à les rejeter « farouchement […] lorsqu’il s’agit d’implantations près de chez soi, signe du syndrome Not in my backyard ».

« Sans doute ces ambivalences sont-elles liées à l’image de l’industrie : 56% des Français craignent d’en subir les externalités négatives (menace en matière de pollution, dégradation de l’environnement, réduction des surfaces agricoles…). »

Bpifrance Le Lab
Charlotte Martin
Responsable Communication

Sophie-Charlotte MARTIN, Conceptrice-Rédactrice spécialisée

Titulaire d'un master 2 en Lettres Classiques, complété d'un master 2 en Communication et d'un cycle web marketing à la CCI de Lyon, Sophie-Charlotte est intervenue sur des sujets aussi B2C que B2B, on et off line.

Régulièrement confrontée aux problématiques tertiaires et industrielles, elle s'est spécialisée en énergie. Aujourd'hui, elle garantit au quotidien la direction et la production éditoriale de l'entreprise. Sophie-Charlotte MARTIN est Responsable éditoriale d'Opéra Energie.