Alors que l’Europe s’efforce de redéfinir sa trajectoire énergétique via le développement de l’hydrogène décarboné, le Commissariat à l’énergie atomique (CEA) apporte un éclairage nouveau avec les résultats de son étude « SISYPHE ». Cette analyse, fruit des contributions de 70 industriels européens, met en évidence un possible décalage entre les objectifs ambitieux fixés par l’Union Européenne en matière de consommation d’hydrogène bas carbone et les estimations réelles de la demande future. Un écart qui pourrait, à terme, compromettre les efforts de décarbonation du Vieux continent.

La réalité face aux ambitions : une demande d’hydrogène moins forte que prévu

L’Union Européenne, à travers son plan REPowerEU, visait à instaurer une consommation annuelle de 20 millions de tonnes d’hydrogène renouvelable d’ici 2030. Or, l’étude SISYPHE, du CEA, révise cette projection à la baisse, anticipant une demande de seulement 2,5 millions de tonnes pour 2030 et de 9 millions pour 2040.

Cette réévaluation souligne un déséquilibre notable entre les aspirations européennes et la capacité du marché à répondre à une telle demande, mettant en lumière les défis à relever pour atteindre les objectifs de réduction des émissions de CO2.

Surmonter les obstacles au développement de l’hydrogène : les solutions du CEA

Le CEA évalue trois obstacles majeurs au développement de cette énergie : les incertitudes liées à la compétitivité de l’hydrogène bas carbone, les défis technologiques et le cadre réglementaire fluctuant. Face à cela, l’organisation a identifié trois solutions. Ces recommandations visent à fournir une feuille de route pour les décideurs politiques et les acteurs industriels, dans l’optique d’accélérer la transition énergétique de l’Europe.

Accélérer le développement de capacités de production d’électricité bas carbone

Afin de fournir l’électricité nécessaire pour produire de l’hydrogène par électrolyse de l’eau sans émettre de CO2, l’Europe doit réaliser plus d’investissements dans les énergies renouvelables et dans l’énergie nucléaire. L’idée est de disposer d’une source d’énergie suffisante et durable pour alimenter le processus de production d’hydrogène.

Assurer le passage à l’échelle des installations de production d’hydrogène et de molécules dérivées :

L’Europe doit mettre en œuvre des initiatives de recherche et développement (R&D) pour améliorer et fiabiliser les technologies clés telles que les électrolyseurs de grande puissance. L’objectif est de faciliter leur industrialisation et de garantir leur déploiement à grande échelle de manière économique.

Clarifier et stabiliser les mécanismes de support

Les gouvernements sont invités à définir clairement et de rendre plus attractifs les cadres réglementaires et les incitations financières pour encourager l’investissement dans l’hydrogène bas carbone. Le CEA propose de s’inspirer de l’Inflation Reduction Act (IRA) aux États-Unis. Réputé pour ses mesures simples et fortement incitatives, il pourrait servir de modèle à l’Europe pour stimuler le marché de l’hydrogène.

Caroline Dusanter
Caroline Dusanter

Diplômée d’un Master 2 du CELSA-Paris Sorbonne, Caroline s’est lancée comme rédactrice et chargée de communication éditoriale indépendante en 2017. Intéressée par les problématiques liées à la transition énergétique et à la mobilité, elle travaille avec Opéra Énergie depuis 2019.

Experte sur les problématiques liées à l'énergie et la rénovation énergétique, elle ambitionne à travers ses articles de faire de la pédagogie sur le marché du gaz et de l’électricité, en constante évolution.