Pétrole : la « flotte fantôme » russe pour contourner les sanctions

Alors que samedi dernier marquait les deux ans de l’invasion de l’Ukraine par les forces russes, Moscou vit au rythme des sanctions occidentales sur la vente de ses ressources. L’utilisation d’une flotte obscure faite de navires étrangers est le moyen trouver par la Russie pour contourner lesdites sanctions.

196 pétroliers chargés

Dans son rapport « Russian Oil Tracker », datant de janvier, l’institut économique ukrainien KSE, indique que « 196 pétroliers chargés d’or noir ont quitté les ports ruses en décembre 2023 ». A quoi servent ces pétroliers ? A contourner les sanctions occidentales contre Moscou suite à l’invasion de l’Ukraine. Vendredi dernier (23 février), cette « flotte fantôme » a été placé sur une liste noire par les Etats-Unis pour s’assurer que le plafond imposé par l’Occident sur le prix du brut vendu par la Russie, soit respecter.

Les sanctions annoncées dans un communiqué du Trésor américain visent la compagnie maritime nationale russe Sovcomflot, lui donnant 45 jours pour décharger le pétrole ou autres cargaisons des 14 navires. Une « flotte fantôme » désigne des navires commerciaux qui ne sont pas détenus par les pays du G7 ou de l’UE, ou qui n’utilisent pas d’assurance P&I (une assurance spécifique au transport maritime qui indemnise de façon illimitée les dommages au tiers), selon la définition de la Kyiv School of Economics (KSE). La réelle propriété des navires est souvent difficile à déterminer, en raison d’assemblages de sociétés à l’origine floue et d’intermédiaires compliquant la tâche.

« Les trois premiers pavillons des navires de la flotte fantôme russe sont le Panama, le Liberia et le Gabon (…) Les compagnies maritimes basées aux Émirats arabes unis constituent le cœur de la flotte fantôme russe, avec cinq nouvelles sociétés de transport dont l’organisation et la structure de propriété ne sont pas transparentes qui ont commencé à transporter du brut russe depuis novembre 2023 sans assurance P&I », indique le KSE.

Un danger environnemental

Embargo pétrolier, plafonnement du prix du brut russe, interdiction de fournir les services permettant le transport maritime de pétrole ; de nombreuses sanctions contre Moscou s’attaquent à la manne des exportations de pétrole, vitale pour la Russie notamment pour financer sa guerre en Ukraine. Pour les contourner, Moscou a dû réduire sa dépendance à l’égard des services maritimes occidentaux en rachetant des tankers auxquels elle offre ses propres services d’assurance.

En plus de permettre à la Russie d’échapper aux sanctions occidentales, cette flotte représente un danger environnemental conséquent. L’institut KSE avance que 73% des pétroliers fantômes qui ont transporté du brut depuis la Russie en décembre ont été construits il y a plus de 15 ans. Ces navires vieillissants, souvent sans assurance, n’ont pas fait l’objet d’un entretien de qualité ou n’ont pas été inspectés récemment, affirme Lloyd’s List Intelligence, présentant ainsi des risques environnementaux importants.

Elisabeth Braw, chercheuse à l’American Enterprise Institute, évoque même « un désastre imminent » dans une tribune pour le site Politico, notant l’augmentation d’accidents impliquant cette flotte noire du fait de la vétusté des navires, mais aussi parce que, pour échapper aux radars, « ils éteignent souvent leur système d’identification automatique (AIS) », un signal GPS que les navires commerciaux sont tenus d’utiliser.

Source : AFP

Giovanni Djossou, journaliste spécialisé
Giovanni Djossou
Journaliste spécialisé

Titulaire d’un Master II en journalisme, Giovanni DJOSSOU a œuvré en tant que journaliste pigiste, en presse écrite, auprès de différents journaux et magazines.
Intéressé par les questions liées à l’énergie, il a la charge de la rédaction d’articles et de brèves pour Opéra Energie.