PPE : le Sénat avance sans le gouvernement
La droite sénatoriale a décidé de prendre l’initiative face à l’absence de projet de loi du gouvernement sur la stratégie énergétique de la France. Le groupe majoritaire au Sénat a présenté son propre texte pour permettre au Parlement de débattre de ce sujet central.
Le projet de loi, examiné par la commission des affaires économiques le 29 mai, a été adopté sans grande difficulté.
Une programmation pluriannuelle de l’énergie reportée et allégée
Le gouvernement a choisi de ne pas passer par le Parlement, évoquant la complexité d’une loi regroupant tous les sujets énergétiques déplore le Sénat. Le projet de loi sur la souveraineté énergétique a ainsi été reporté sine die tout en étant de surcroît considérablement allégé, se concentrant désormais sur la régulation des prix et la protection des consommateurs. Pourtant, la loi énergie-climat de 2019 impose la présentation d’une loi quinquennale de programmation énergétique avant le 1er juillet 2023.
Le Sénat ne veut plus attendre
« Accélérer notre transition énergétique et conforter notre souveraineté énergétique constituent un impératif économique, doublé d’une urgence morale, pour décarboner et relocaliser notre production d’énergie mais aussi modérer notre consommation. » expliquent les sénateurs.
Aussi ont-ils décidé de s’emparer du sujet en faisant une proposition de loi qui porte une « programmation nationale ambitieuse et une simplification normative idoine » et qui puisse « remédier au désordre politique et juridique qui règne dans le secteur de l’énergie. »
Une relance nucléaire ambitieuse
La proposition de loi sénatoriale vient fixer des objectifs ambitieux, notamment pour la relance du nucléaire.
Elle acte ainsi :
- Le maintien à plus de 60 % de la production d’électricité nucléaire à l’horizon 2030 et d’un mix majoritairement nucléaire à l’horizon 2050 ;
- La construction d’au moins 27 gigawatts (GW) de capacités installées d’ici 2050, dont 14 EPR2 et 15 SMR ;
- La mise à l’étude de la construction de 6 EPR2 supplémentaires d’ici la prochaine loi de programmation ;
- La garantie d’une disponibilité nucléaire à + de 75 % d’ici 2030 ;
- Le recours à plus de 20 % de matières recyclées dans la production d’électricité nucléaire d’ici 2030.
Des objectifs clairs pour les EnR, y compris pour le solaire et l’hydraulique
En matière d’énergies renouvelables, les sénateurs LR visent à atteindre, d’ici 2030, une part de 58 % d’énergies décarbonées dans la consommation finale brute d’énergie. Ce pourcentage inclut 45 % pour la chaleur et le froid renouvelables et 20 % pour le gaz renouvelable.
Contrairement au Code de l’énergie qui ne précise pas d’objectifs chiffrés pour l’hydraulique, la proposition de loi sénatoriale fixe également un objectif de 29 GW de capacités installées d’ici 2035.
Sur l’éolien, le texte invite à privilégier les éoliennes flottantes en mer et à renouveler les installations terrestres existantes.
Enfin, pour le photovoltaïque, un amendement a été adopté pour clarifier l’objectif de production. Celle-ci devra atteindre une capacité installée d’au moins 50 GW à l’horizon 2030. La trajectoire actuelle fixe un palier à 44 GW pour 2028, tandis que le projet de stratégie française sur l’énergie et le climat, mis en consultation fin 2023, prévoit d’atteindre entre 75 et 100 GW d’ici 2035.
La loi vise également à réduire la consommation d’énergies fossiles de 30 % d’ici 2030 et à interdire la production d’électricité à partir de charbon d’ici 2027, avec une dérogation en cas de menace sur l’approvisionnement.
De nouvelles mesures de protection des consommateurs
Outre le maintien des tarifs réglementés de vente de l’électricité, la proposition de loi inclut encore des mesures pour renforcer la protection des consommateurs, suivant les recommandations de la Commission de régulation de l’énergie (CRE) ou du Médiateur national de l’énergie (MNE).
Les modifications suivantes sont notamment proposées :
- Interdiction de qualifier d’offres à prix fixe les contrats écrêtés à l’accès régulé à l’électricité nucléaire historique (ARENH), que ces contrats soient inférieurs ou supérieurs à 36 kVA ;
- Optimisation des présentations des offres de fourniture qui devront être accompagnées de fiches harmonisées, afin d’en faciliter la comparaison ;
- Obligation par le fournisseur de proposer une révision de l’échéancier de paiement, afin de réduire le montant de la facture de régularisation.
Le texte sera maintenant débattu en séance publique les 11 et 12 juin.