Prolongation des réacteurs de 900 MWe au-delà de 40 ans ?
« L’ASN considère que l’ensemble des dispositions prévues par EDF et celles qu’elle prescrit ouvrent la perspective d’une poursuite de fonctionnement des réacteurs de 900 MWe pour les dix ans suivant leur quatrième réexamen périodique. Le réexamen périodique sera ensuite décliné sur chaque réacteur de 900 MWe jusqu’en 2031. » déclare le Gendarme de l’énergie.
Dans son projet de décision, soumis à consultation publique jusqu’au 15 janvier 2021, l’ASN ouvre donc la voie à une possible poursuite d’activité des plus anciens réacteurs du parc nucléaire français. Ce projet de décision concerne 32 réacteurs de huit centrales nucléaires, tous construits à la fin des années 70 : Blayais, Bugey, Chinon, Cruas, Dampierre, Gravelines, St Laurent et Tricastin. A ce jour, seul Tricastin 1 a passé la 4ème visite décennale. Les inspections des autres réacteurs devraient durer jusqu’en 2031.
« Les dispositions prévues par EDF, complétées par les réponses aux prescriptions formulées par l’ASN, permettront (…) de rapprocher le niveau de sûreté des réacteurs de 900 MWe de celui des réacteurs les plus récents comme l’EPR » a ainsi annoncé à la presse le président de l’Autorité, Bernard Doroszczuk. Attention cependant, « la mise en place des modifications correspondant aux plus forts enjeux de sûreté doit être une priorité pour EDF, pour donner du sens à la poursuite du fonctionnement des réacteurs de 900 MWe » a-t-il tenu à souligner.
Ce quatrième examen décennal, réalisé sur chaque réacteur, est d’autant plus important pour l’avenir de la filière que chaque unité avait été conçue dans une hypothèse de 40 ans de fonctionnement (même s’il n’existe aucune limite officielle de durée).
L’avis de l’ASN, attendu mais controversé
Cet avis générique de l’ASN, avant les avis individuels, intervient au terme de sept ans d’échanges avec EDF, visant à revoir le niveau de sûreté face aux agressions internes ou externes, avec l’actualisation des connaissances, la prise en compte de nouveaux enjeux (climatiques par exemple) ou encore les leçons tirées d’accidents tels que celui de Fukushima.
Quoi qu’il en soit, EDF devra fermer sept paires de réacteurs parmi ceux de 900 MWe d’ici 2035, ainsi que le prévoit la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE). Il s’agit en effet de ramener la part de l’énergie nucléaire à 50% du mix électrique, contre 72% actuellement. Pour le moment, rien n’est annoncé.
Ce projet de décision n’a pas manqué de soulever des objections. Greenpeace déplore ainsi que « Les travaux de mise aux normes prescrits par l’ASN prendront des années. Certaines prescriptions de l’ASN ne seront donc pas respectées avant les 45 ans de fonctionnement des réacteurs, alors que ceux-ci continueront d’être exploités et de présenter un risque pour les populations et l’environnement. »
Mais 40 ans « Ce n’est pas une échéance mais la durée retenue, à la construction, pour faire les calculs de conception et qualifier les matériels » veut rassurer Valérie Faudon, déléguée générale de la Société française d’énergie nucléaire (SFEN). « Autrement dit, les composants devaient être conçus pour durer au moins quarante ans, ce qui ne veut pas dire qu’ils ne peuvent pas durer plus. En Suède, en Suisse, des réacteurs similaires ont déjà passé les 40 ans de fonctionnement. Aux Etats-Unis, des autorisations viennent d’être accordées pour aller jusqu’à 80 ans. »
Les débats autour de l’avenir du nucléaire ne semblent pas prêts de finir…