Réduction du TURPE : quels changements sont validés par la CRE ?
La CRE vient de rendre son avis quant au projet de décret qui vient amender les possibilités de réduction du tarif d’utilisation du réseau public de transport (TURPE). Le Régulateur valide l’ensemble du texte, tout en relevant « la baisse des taux de réduction pour certains industriels fortement soumis à la concurrence internationale. »
Suppression des critères liés au caractère électro-intensif des sites
Le projet de décret met fin au critère d’électro-intensivité pour prétendre à une réduction du TURPE. Dorénavant, les sites éligibles répondront aux critères suivants :
- Profil stable : électricité annuelle soutirée sur le réseau de transport d’électricité supérieure à 10 GWh ; durée d’utilisation annuelle du réseau supérieure ou égale à 7 000 heures ; hors sites permettant le stockage de l’énergie en vue de sa restitution ultérieure au réseau ;
- Profil anticyclique : électricité annuelle soutirée sur le réseau de transport d’électricité supérieure à 10 GWh ; taux d’utilisation annuelle du réseau en heures creuses supérieur ou égal à 44 % ; hors sites permettant le stockage de l’énergie en vue de sa restitution ultérieure au réseau ;
- Grand consommateur d’électricité : électricité annuelle soutirée sur le réseau de transport d’électricité supérieure à 500 GWh ; taux d’utilisation annuelle du réseau en heures creuses supérieur ou égal à 40% et inférieur à 44 % ; hors sites permettant le stockage de l’énergie en vue de sa restitution ultérieure au réseau ;
- Sites permettant le stockage de l’énergie en vue de sa restitution ultérieure au réseau : électricité annuelle soutirée sur le réseau de transport d’électricité supérieure à 10 GWh ; taux d’utilisation du réseau en heures creuses supérieur ou égal à 44 %.
La CRE estime ce changement favorable, puisqu’il permet« une amélioration du dispositif en termes de lisibilité » tout en réduisant les « potentielles discriminations entre utilisateurs dont les caractéristiques de consommation sont similaires. » Il s’agit en fait de définir des critères d’éligibilité en fonction de caractéristiques relatives à la consommation d’électricité et à l’usage du réseau, et non plus sur le rapport entre la consommation d’électricité et la valeur ajoutée comme avec l’électro-intensivité ou l’hyper électro-intensivité.
Changement de calcul des taux de réduction du TURPE
Dans le cadre du dispositif en vigueur, les taux de réduction sont définis de manière normative, sans qu’il soit fait référence aux coûts du réseau public de transport. Ces taux varient de 5 % à 90 % selon les catégories des sites concernés. Au contraire, le projet de décret fait en sorte que ces taux de réduction soient fonction, du moins soient justifiés par les coûts de réseau.
La CRE valide la révision des modalités de calcul des taux de réduction du TURPE qui « seront désormais calculés de manière à ce que la facture après application de la réduction reflète le coût moyen d’une ligne directe pour chacune des catégories de sites éligibles. »
Le Régulateur rappelle qu’une ligne directe est un ouvrage fictif dédié reliant le site de consommation à la production suffisante la plus proche et dimensionné à une puissance suffisante, en supposant que le réseau public de transport n’existe pas. Les coûts d’une ligne directe sont définis comme le minimum entre :
- les coûts de capital et les coûts de fonctionnement, majorés de 10%, d’une ligne dont la puissance maximale est calibrée pour alimenter la demande de pointe du site à partir du moyen de production d’électricité le plus proche et de capacité de production suffisante ;
- les coûts de capital et les coûts de fonctionnement d’une ligne de puissance maximale calibrée pour alimenter la demande en pointe de ce site à partir des deux moyens de production d’électricité de capacité de production réunie suffisante les plus proches.
Les taux qui résultent de ce calcul sont les suivants :
Catégorie | Critère | Taux de réduction |
Profil stable | Soutirage > 10 GWh et durée d’utilisation ≥ 7000 heures | 81 % |
Profil anticyclique | Soutirage > 10 GWh et taux d’utilisation en heures creuses ≥ 44 % | 74 % |
Grand consommateur | Soutirage > 500 GWh et taux d’utilisation du réseau en heures creuses compris entre 40 % et 44 % | 76 % |
Stockage | Soutirage > 10 GWh et taux d’utilisation en heures creuses ≥ 44 % | 50 % |
(Source : CRE)
Le CRE estime que cette nouvelle modalité de calcul des taux de réduction du TURPE « constitue une amélioration relative en matière d’orientation vers les coûts. »
Abattement du TURPE : nouvelle condition d’attribution avec le plancher de facture
Le projet de décret stipule qu’un site éligible ne pourra bénéficier de la réduction du TURPE qu’à la condition que le montant résiduel de TURPE couvre les coûts de réseau qui lui sont directement imputables.
Les coûts directement imputables correspondent aux coûts qui seraient évités si le site se déconnectait du réseau.
Ainsi, la facture d’un site éligible à la réduction du TURPE sera égale au maximum :
- de la facture après application du taux de réduction applicable à sa catégorie ;
- et des coûts de réseau qui lui sont directement imputables
« Le plancher de facture introduit par le projet de décret permet en principe qu’aucun bénéficiaire ne paie moins que les coûts qui seraient économisés à terme s’il se retirait du réseau. Par comparaison avec le dispositif actuellement en vigueur, cette nouvelle condition appliquée site par site améliore le reflet des coûts. » commente la CRE.
Des taux de réduction révisés tous les 4 ans
Le projet de décret prévoit la possibilité de faire évoluer les taux de réduction tous les quatre ans. Pour la CRE, « La possibilité de modifier par arrêté les taux de réduction permettra une mise à jour régulière du dispositif en fonction de l’évolution des coûts, de la topologie du réseau et de la situation des sites éligibles. »
Généralisation de l’assujettissement à l’élaboration d’un plan de performance énergétique
Aujourd’hui, les sites respectant un des critères d’électro-intensivité (entreprises électro-intensives, sites électro-intensifs et sites hyper électro-intensifs) bénéficient des taux de réduction de leur catégorie à condition d’élaborer un plan de performance énergétique. Le projet de décret souhaite étendre l’obligation d’élaboration d’un plan de performance énergétique à l’ensemble des sites bénéficiaires du dispositif, à l’exclusion des sites de stockage.
« La généralisation de cette condition encourage la participation des sites fortement consommateurs à l’effort de sobriété, qui est une des composantes majeures de la transition énergétique. » se félicite la CRE.
Modification de l’abattement du TURPE : quel impact financier ?
« Le montant prévisionnel des réductions du TURPE résultant du nouveau dispositif s’élève à environ 230 M€ par an, en augmentation d’environ 57 M€ par rapport aux prévisions établies à partir du dispositif en vigueur sur la période du TURPE 6. Le manque à gagner supplémentaire pour RTE sera compensé au travers du compte de régulation des charges et produits (CRCP). Le niveau du TURPE HTB devra être augmenté d’environ +1,3 %. Cette hausse tarifaire sera portée par l’ensemble des autres utilisateurs du réseau. » estime la CRE.