
Le soutien public au solaire photovoltaïque sur toiture subit un nouveau tour de vis. Face à une flambée des projets et à des objectifs budgétaires serrés, l’État opte pour une réduction des tarifs de rachat et prépare un changement profond de mécanisme dès l’automne.
-6,8% sur le tarif de rachat
La filière photovoltaïque le redoutait, le coup de rabot est confirmé : au 1er juillet, le tarif d’achat des surplus d’électricité produite par les installations sur grandes toitures (100 à 500 kW) sera abaissé de 6,8 %, passant de 95 à 88,60 euros/MWh, selon la CRE. Ce tarif était déjà en baisse depuis mars, traduisant un recul total de 19,5 % depuis le début de l’année. Les particuliers, quant à eux, ont vu leur tarif chuter bien plus tôt, à 40 euros/MWh dès février.
Cette évolution s’inscrit dans une stratégie de recentrage des aides publiques. Comme le justifiait le gouvernement en début d’année, l’objectif est de favoriser « les installations les plus efficaces » pour éviter un « emballement » des projets. Le solaire est aujourd’hui la filière la plus soutenue par le budget public en métropole. La CRE estimait récemment que les aides passeraient de 2,1 milliards d’euros en 2024 à 2,9 milliards en 2025, principalement à cause d’anciens contrats très coûteux.
Avec une multiplication des projets de raccordement, notamment sur les toitures et les parkings, la réponse de l’État a été la mise en place d’un tarif dégressif dès cet été. La baisse de juillet est ainsi la conséquence directe d’un dépassement des objectifs de raccordement entre mars et mai : les demandes y ont été 2,3 fois supérieures aux attentes.
Des appels d’offres simplifiés pour la rentrée
Le secteur devra aussi s’adapter à un changement profond de modèle dès la rentrée. Le dispositif actuel de guichet unique sera remplacé par des appels d’offres simplifiés, visant à mieux maîtriser les volumes et la dépense publique. Si les acteurs ont anticipé ce virage — parfois en tentant de verrouiller les anciens tarifs —, l’inquiétude reste forte. « Nous nous attendions à la baisse du tarif de rachat », explique Jules Nyssen, président du Syndicat des énergies renouvelables (SER). Il évoque les hésitations de début d’année et l’afflux massif de dossiers pour bénéficier des conditions les plus favorables avant le changement de réglementation. Depuis l’instauration d’une caution de 10 000 euros au printemps, les volumes déposés ont toutefois reculé d’un tiers. Mais l’avenir reste flou. « Ce qui nous importe le plus, c’est qu’on ne réduise pas les volumes des appels d’offres à peau de chagrin, au motif qu’on aurait déjà dépassé l’objectif annuel », alerte encore Jules Nyssen.
Cette incertitude s’inscrit dans un contexte énergétique national brouillé. Au printemps, Emmanuelle Wargon, présidente de la CRE, estimait dans Les Échos qu’il y avait « un peu de marge du côté du solaire et de l’éolien », en raison du « retard de la croissance de la demande d’électricité ». La consommation électrique n’a pas encore retrouvé son niveau d’avant-Covid, tandis que les grands leviers de l’électrification (voiture, industrie, logement) tardent à produire leurs effets. Résultat : la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) demeure en suspens, et le débat parlementaire reste tendu. Cette semaine encore, une proposition de moratoire sur les projets solaires et éoliens a été rejetée dans un climat divisé. Le gouvernement promet désormais un décret avant la fin de l’été, espérant clarifier une trajectoire énergétique toujours aussi incertaine.
Titulaire d’un Master II en journalisme, Giovanni DJOSSOU a œuvré en tant que journaliste de presse écrite dans différents journaux et magazines pendant plus d’une décennie.
Spécialisé dans le secteur de l’énergie depuis 2023, il a la charge de la rédaction d’articles, de la conduite d’interviews ainsi que de la création de programmes pour Opéra Energie.