Transition énergétique : le Sénat dénonce le stop and go du gouvernement
Le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, a annoncé que la croissance économique française pour l’année 2024 serait moins robuste que prévu, avec une prévision ramenée à 1%. Cette révision est due à divers facteurs géopolitiques tels que la guerre en Ukraine, les tensions au Moyen-Orient et le ralentissement économique en Chine, ainsi qu’à une récession en Allemagne en 2023. Pour compenser des recettes fiscales inférieures aux attentes et pour respecter les objectifs budgétaires, le gouvernement prévoit des économies immédiates de 10 milliards d’euros.
Bercy annonce de nouvelles coupes budgétaires
Le gouvernement va notamment abaisser d’un milliard d’euros l’enveloppe de l’aide à la rénovation énergétique MaPrimeRénov’.
« On avait annoncé une enveloppe supplémentaire de 1,6 milliard de 2023 à 2024 » et « il y aura toujours une augmentation de 600 millions, mais nous récupérons 1 milliard » explique le ministre. L’enveloppe allouée à MaPrimeRénov’ sera donc de 3 milliards d’euros.
Par ailleurs, la dotation supplémentaire du Fonds vert « initialement prévu à 500 millions d’euros, sera limitée à 100 millions d’euros ».
La hausse du budget consacré à la Transition écologique est ramenée de 10 milliards à 8,6 milliards, a précisé le ministre Christophe Béchu dans un communiqué, vantant néanmoins « une hausse sans précédent » de son budget.
Le Sénat dénonce un manque de planification budgétaire
Les sénateurs expriment leur incompréhension si ce n’est leur indignation face à des annonces qui témoignent, selon eux, d’un manque de planification budgétaire sur le chantier de la transition énergétique. Un chantier pourtant prioritaire, de l’aveu même du gouvernement.
« On nous avait présenté le projet de loi de finances 2024 comme celui qui devait préparer l’avenir face aux enjeux climatiques, de santé, d’éducation… Au final, c’était un effet d’annonce », déplore la sénatrice Les Républicains Christine Lavarde, rapporteure du volet écologie de ce PLF 2024.
Guillaume Gontard, président du groupe écologiste au Sénat, fait également part de ses préoccupations quant à la capacité de l’État à tenir ses engagements de neutralité carbone. Il souligne que, même avec l’augmentation budgétaire initialement prévue, le rythme de rénovation de 700 000 logements par an était loin d’être atteint.
« C’est un signal désastreux qui montre que ce gouvernement n’a pas de vision. Bruno Le Maire a l’impression de faire des économies, mais si on n’investit pas dans ces secteurs de transition et d’adaptation au changement climatique, ce seront des dépenses publiques beaucoup plus importantes pour les années à venir. » explique celui qui a aussi été rapporteur d’une commission d’enquête sur l’efficacité des politiques publiques en matière de rénovation énergétique l’an dernier.
« La baisse d’un milliard d’euros de l’aide à la rénovation énergétique MaPrimeRénov’ vient ralentir les efforts nécessaires » abonde le réseau d’acteurs pour la transition énergétique CLER, qui appelle à une consultation « pour faire entendre la voix des acteurs de terrain ».
Baisse du Fonds vert : une décision « incompréhensible »
Mis en place il y a à peine plus d’un an, le Fonds vert vise à accélérer la transition énergétique des territoires. Son enveloppe devait augmenter de 500 millions, finalement la hausse ne sera que de 100 millions. Une baisse qui étonne, « incompréhensible » pour Guillaume Gontard qui rappelle que « Tout le monde dit que c’est par le local que passera en premier lieu la transition, en matière d’agriculture, de mobilité, d’énergie… Ce fonds donnait un peu de souffle aux collectivités pour mener des actions concrètes avec un réel impact. »
Cette baisse interpelle d’autant plus que le Fonds vert avait clairement rencontré son public. Le rapport de Christine Lavarde sur la mission écologie du PLF 2024 a ainsi souligné le succès du dispositif, avec près de 17 000 dossiers déposés par les communes en 2023.
« L’État met en péril la capacité d’investissement local, pourtant l’un des leviers les plus efficaces pour la transition écologique. Contrairement aux annonces, ce choix budgétaire démontre bien que l’État n’est pas le seul à devoir “faire des efforts”. » alerte le Réseau action climat. « Comment demander d’une part aux collectivités d’investir toujours plus dans la transition écologique, tout en ne leur permettant pas d’avoir confiance dans les ressources accordées par l’Etat, qui une fois votées en décembre, peuvent être retirées en février ? »