
L’Union européenne et les États-Unis ont conclu un accord majeur qui redéfinit les équilibres énergétiques et commerciaux entre les deux blocs. Présenté comme une avancée stratégique par certains, ce partenariat suscite de vives critiques en Europe, où il est perçu par d’autres comme un recul de souveraineté économique.
Réorientation énergétique à marche forcée : « Un jour sombre » pour l’Europe
À la suite de la guerre en Ukraine et dans un contexte de tensions géopolitiques croissantes avec la Russie, l’Union européenne s’engage à se détourner massivement des hydrocarbures russes. Lors d’une conférence de presse tenue dimanche en Écosse à l’issue d’une rencontre avec le président américain Donald Trump, la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a annoncé : « Nous remplacerons le gaz et le pétrole russes par des achats importants de GNL, de pétrole et de combustibles nucléaires américains », pour un montant de 750 milliards de dollars sur trois ans.
Ce virage énergétique s’inscrit dans une stratégie plus large de renforcement des liens transatlantiques, avec pour objectif affiché de réduire la dépendance européenne à l’égard de Moscou. Parallèlement, l’Union s’engage également à investir 600 milliards de dollars supplémentaires aux États-Unis, en appui de ce partenariat renforcé. Toutefois, cette nouvelle orientation n’est pas exempte de critiques. Le Premier ministre français François Bayrou a dénoncé un affaiblissement de l’indépendance européenne : « C’est un jour sombre que celui où une alliance de peuples libres, rassemblés pour affirmer leurs valeurs et défendre leurs intérêts, se résout à la soumission », a-t-il déclaré sur le réseau X.
Un compromis commercial contesté
L’accord prévoit également la levée réciproque de droits de douane sur plusieurs catégories de produits. Selon Ursula von der Leyen, les deux puissances économiques ont décidé de supprimer les droits sur « un certain nombre de produits stratégiques », incluant l’aéronautique, certains produits chimiques, des équipements pour semi-conducteurs, produits agricoles et matières premières critiques.
Mais les négociations ont aussi abouti à l’instauration de droits de douane américains de 15 % sur les exportations européennes, un point de friction majeur. Interrogé par la presse, Donald Trump a clairement écarté toute réduction de ce taux : « Non », a-t-il répondu lorsqu’un journaliste lui a demandé si ces droits pourraient être inférieurs à 15 %, ajoutant que les produits pharmaceutiques ne seraient « pas concernés » par l’accord.
Les réactions du secteur industriel européen ne se sont pas fait attendre. La Fédération allemande de l’industrie chimique (VCI), représentant des entreprises comme Bayer ou BASF, a estimé que « quand on s’attend à un ouragan, on se réjouit d’une simple tempête », soulignant que si une escalade a été évitée, « le prix à payer est élevé pour les deux parties ». De son côté, la Fédération allemande de l’industrie (BDI) a dénoncé « un compromis insuffisant » et « un signal fatal à l’économie étroitement interdépendante des deux côtés de l’Atlantique ». Selon elle, « l’UE accepte des droits de douane douloureux qui auront des répercussions négatives considérables sur l’industrie allemande, très orientée vers l’exportation ».
Ce double accord énergétique et commercial, bien qu’il vise à renforcer l’alliance transatlantique, interroge sur le coût stratégique pour l’Europe, prise entre l’urgence énergétique et la protection de ses intérêts économiques.
Titulaire d’un Master II en journalisme, Giovanni DJOSSOU a œuvré en tant que journaliste de presse écrite dans différents journaux et magazines pendant plus d’une décennie.
Spécialisé dans le secteur de l’énergie depuis 2023, il a la charge de la rédaction d’articles, de la conduite d’interviews ainsi que de la création de programmes pour Opéra Energie.