Une commission du Parlement européen exclut le recours aux CFD pour le nucléaire existant
Le 18 juillet dernier, les eurodéputés de la commission industrie du Parlement européen ont adopté un projet de réforme excluant les centrales déjà existantes des CFD. Bien que le projet ne soit pas encore acté, il est une mauvaise nouvelle pour la France.
Vers une hausse des prix de l’électricité ?
C’est dans le cadre de la difficile réforme du marché de l’électricité que le projet d’amenuiser le champ d’action des Contracts For Difference (CFD) a vu le jour. Ces instruments financiers dérivés, censés protéger les consommateurs et les producteurs d’électricité par le système des prix garantis, deviendront le seul régime d’aides publiques autorisées pour le renouvelable et le nucléaire. Les CFD rétribueraient les producteurs en cas de prix trop bas et les producteurs reverseraient le surplus à l’Etat si le cours sur le marché est supérieur au prix garanti.
Ces prix garantis ne s’appliqueront aux centrales existantes à la seule condition que de « substantiels » investissements soient réalisés pour rénover ou prolonger ces centrales. Or, ces investissements se montrant très onéreux, la France ne pourra pas appliquer les CFD à l’ensemble de sa production nucléaire.
Plusieurs eurodéputés français ont affiché leur désapprobation et exprimé leurs inquiétudes face à la réforme. « En excluant les centrales nucléaires existantes, le texte tel que voté aujourd’hui limiterait la capacité des Etats à financer leur prolongation et à garantir un prix bas pour les consommateurs », d’après l’eurodéputé LR, François-Xavier Bellamy. Même son de cloche du côté de Christophe Grudler (MoDem) qui estime que l’initiative mettra la France et l’Union européenne tout entière en grande difficulté et à terme, posera des questions sur l’approvisionnement en électricité.
Une posture idéologique ?
Le 16 juin dernier, la Commission européenne reconnaissait officiellement que les centrales nucléaires jouaient un rôle dans l’objectif d’émissions nettes de carbone nulles, pour le plus grand bonheur du gouvernement français. A cette annonce, certains pays considérés comme antinucléaires -Allemagne, Autriche et le Luxembourg- avaient manifesté leur désaccord et publiquement souhaité que les CFD ne soient pas appliqués au nucléaire. La commission industrie du Parlement semble donc avoir coupé la poire en deux, en accordant le recours aux CFD pour les nouveaux réacteurs tout en excluant les anciens.
Pour Christophe Grudler, cette initiative n’est rien de plus qu’un combat idéologique contre le nucléaire : « C’est une vision qui relève du dogme antinucléaire. L’atome est indispensable pour atteindre les objectifs de Green Deal ».
Camille Defard, cheffe du centre Energies de l’Institut Jacques Delors, tempère néanmoins ce procès d’intention. Pour elle, si le projet mettrait, en effet, à mal les activités des industriels du nucléaire ; il faut l’appréhender comme « un signal de long terme pour leur business model ». Et la chercheuse de poursuivre en jugeant la position français « hypocrite » tant le pays est en retard sur le renouvelable. L’absence de distinction entre nouvelles et anciennes centrales avantageait la France et son parc. Mais cela ne l’aurait pas poussé à investir dans le renouvelable.
Les eurodéputés souhaiteraient entériner ce projet le plus rapidement possible – avant la fin de la présidence espagnole de l’Union européenne, le 31 décembre prochain. Certains législateurs envisagent même d’ouvrir directement le dialogue avec le Conseil européen et ainsi éviter de passer par un vote, afin d’accélérer la procédure.