Le DPE est-il fiable ?
Depuis le 1er janvier, le diagnostic de performance énergétique (DPE) est obligatoire pour les immeubles de propriétés individuelles et les copropriétés de plus de 200 lots. Dans le même temps, une étude du Conseil d’analyse économique (CAE) questionne en profondeur la pertinence du mécanisme.
DPE collectif obligatoire
Créé en 2006, le DPE est un instrument estimant la performance énergétique et climatique d’un logement en mesurant ses consommations d’énergie et ses émissions de CO2. Il est obligatoire pour la vente et la location des logements en France métropolitaine. Le DPE est effectué à l’initiative du propriétaire ou du bailleur et à ses frais. Alors que, jusqu’ici, seul le DPE individuel était obligatoire, le DPE collectif le devient aussi, en 2024.
Le DPE collectif évalue la consommation d’énergie des parties communes d’un immeuble résidentiel. Le DPE collectif pour les copropriétés avec installations collectives de chauffage et de climatisation de moins de 50 lots était déjà obligatoire. Depuis le 1er janvier 2024, il le devient pour les immeubles de propriétés individuelles et les copropriétés de plus de 200 lots. En 2025, l’obligation s’étendra aux copropriétés de 50 à 200 lots, à usage d’habitation ou professionnel. Enfin, en 2026, viendra le tour des copropriétés de moins de 50 lots.
La réalisation du DPE est à la discrétion des copropriétaires en Assemblée générale et doit être inscrit à l’ordre du jour. La période traditionnelle pour les Assemblées générales annuelles étant le printemps, on peut s’imaginer que peu de DPE auront été effectués avant cette période, malgré l’obligation du 1er janvier.
Concernant le coût, il n’y a pas de réglementation sur les tarifs d’un DPE. Le diagnostic peut aller de 1 000 € à 5 000 €. Tout dépend du système de chauffage, du nombre de lots et de la taille du bâtiment.
DPE : un mécanisme pertinent ?
Le 10 janvier, Les Echos se sont procuré en exclusivité un rapport du Conseil d’analyse économique (CAE). L’objectif de l’étude était d’évaluer l’écart entre la consommation réelle et la consommation théorique du DPE. Les analystes du Conseil mettent en avant un effet de rebond du DPE, à savoir que, les habitants adaptent leur consommation au confort énergétique du logement. En d’autres termes, plus le logement est bien isolé, plus sa température moyenne est élevée. Ainsi, « l’ajustement comportemental » au DPE explique les deux tiers de cet écart observé.
Trois conclusions sont apportées par le rapport du CAE.
Le DPE surestime la consommation d’énergie des logements les moins performants
A travers l’Energy Performance Gap, le CAE observe que la hausse réelle de la consommation d’énergie au mètre carré entre un logement classé A ou B et un logement classé G est de 86% quand elle est théoriquement multipliée par 6 lorsque l’on se fie au DPE.
Le DPE pénalise les grands logements
Plus la superficie du logement augmente, plus la progressivité s’amenuise. « Les logements de moins de 30m² ont une moyenne de consommation réelle nettement supérieure à leur consommation prédite », précise l’étude. Cette réalisation vient contredire l’idée répandue selon laquelle le DPE pénalise les petites surfaces.
La consommation dépend davantage des revenus que du DPE
Le rapport montre que les ménages aisés ont une consommation largement supérieure à la prédiction du DPE. Les ménages modestes, à l’inverse, ont une consommation inférieure à la prédiction. De manière plus globale, les caractéristiques sociodémographiques (âge, revenus, composition du ménage etc.) sont responsables de 45% de la variance totale observée.
« Une grande partie des politiques publiques sont décidées sur la base de modèles théoriques qui ne tiennent pas suffisamment compte des comportements réels des ménages. Une meilleure connaissance empirique de ses ajustements devrait permettre d’adapter au mieux les outils et les incitations à mettre en place », conclut Gabrielle Fack, professeure d’économie à l’université Paris-Dauphine et co-auteur du rapport.
Ces résultats incitent à une refonte du DPE. Cela doit être discuté en ce début d’année, avec la possibilité d’introduire un « coefficient de pondération » proposé par le gouvernement, afin d’affiner le dispositif.