Electricité : les alternatifs exclus des contrats de long terme
Alors que les modalités détaillées de la nouvelle régulation du nucléaire se font toujours attendre, voilà une annonce qui risque de ne pas passer inaperçue.
Un porte-parole d’EDF a ainsi déclaré au média spécialisé Montel que les contrats de fourniture long terme ne seront bien réservés qu’aux industriels, excluant les fournisseurs alternatifs.
Les fournisseurs ne pourront souscrire que des contrats moyen terme avec EDF
Déjà en novembre dernier, l’exécutif d’EDF avait expliqué que les contrats long terme (ou contrats pour allocation nucléaire-CPAN) seraient réservés aux industriels français les plus énergivores. 20 TWh seraient alloués à quelque 150 entreprises, les plus gourmandes en électricité. Les fournisseurs alternatifs pourraient quant à eux signer des contrats de moyen terme, sur 4 à 5 ans, avec l’Electricien historique.
En juin 2023, EDF se disait pourtant prêt à signer des contrats long terme avec ses concurrents
Pourtant, en juin, lors d’un colloque de l’Union française de l’électricité (UFE), Luc Rémont déclarait être prêt « à former des contrats de long terme avec l’ensemble des clients. (…) Sous réserve que nous trouvions un cadre d’opérations pour EDF qui soit évidemment équilibré dans le long terme, nous considérons les fournisseurs d’énergie et les autres investisseurs dans l’énergie comme des clients ou des partenaires ».
Une démarche saluée par les fournisseurs alternatifs, comme TotalEnergies.
Patrick Pouyanné, qui intervenait au même colloque aux côtés de Luc Rémont, avait ainsi abondé « Des fournisseurs d’électricité peuvent parfaitement devenir les partenaires d’EDF, on n’a pas besoin d’un règlement d’Etat ».
Pouyanné a d’ailleurs réitéré ses propos le 19 janvier, à Davos, expliquant être disposé à « signer des contrats sur 15-20 ans » pour aider EDF « à financer ses nouvelles tranches nucléaires ».
Quid de la concurrence sur le marché de l’électricité en France ?
Exclure les fournisseurs alternatifs de ces contrats nucléaires à long terme pourraient contrevenir au droit en matière de concurrence, ont souligné des acteurs du secteur lors d’échanges avec Montel. Un représentant d’un fournisseur alternatif estime que cela revient à dire que le secteur des électro-intensifs est désormais du seul ressort d’EDF.
Également interviewé par Montel, Henri Reboullet, PDG de Vattenfall Energies, met en garde contre le risque d’un partage inéquitable du marché entre quelques grands acteurs si l’accès à ces contrats n’est pas ouvert à tous les fournisseurs dans des conditions équitables avec EDF.
La CRE craint un risque de verrouillage de marché
Ces déclarations d’EDF interviennent quelques jours après que la Commission de régulation de l’énergie et l’Autorité de la concurrence ont fait part de leurs doutes sur le futur dispositif.
Dans un courrier adressé au gouvernement, les Gendarmes de l’énergie lui demandent de « garantir que les contrats d’allocation de long terme adossés à la production nucléaire (CAPN) seront attribués dans des conditions permettant un égal accès des différents acteurs aux volumes d’électricité concernés par ces contrats. »
Plus largement, la CRE et l’ADLC plaident pour que l’Etat prenne les mesures nécessaires pour « garantir une concurrence équitable » et établisse des garde-fous.
Ces contrats long terme inquiètent les grands consommateurs non électro-intensifs
D’autres acteurs pointent également l’inégalité du dispositif. Ainsi, pour Frank Roubanovitch, ouvrir les CAPN aux fournisseurs alternatifs obligerait EDF à attribuer plus de 20 TWh à ce type de contrats et surtout à les rendre accessible à davantage d’entreprises.