Nucléaire : comment EDF va financer 6 nouveaux EPR
En début d’année, le ministère de la transition énergétique avait annoncé que le gouvernement ne prendrait pas de décision sur la construction de nouveaux EPR en France avant la mise en service de Flamanville. En septembre, même discours de la part de Barbara Pompili au micro de France Inter : « Il n’y a aucun projet de commander six nouveaux EPR. C’est une hypothèse qui est posée sur la table par EDF mais ça n’a absolument pas été tranché ».
Il faut croire que les choses s’accélèrent puisque selon le média spécialisé Contexte, qui a eu accès à un document rédigé par la Direction générale du Trésor, EDF envisage de mettre en service six EPR de deuxième génération entre 2035 et 2044, à un coût total estimé de 47,2 milliards d’euros.
Le texte précise que les trois paires d’EPR pourraient être mises en service respectivement en 2035-36, en 2039-40 et en 2043-44, chaque chantier s’étalant sur 12 ans. Dans son document, le Trésor chiffre à 16,4 milliards d’euros le coût de la première paire d’EPR, à 15,9 milliards d’euros le coût de la deuxième, et à 14,9 milliards d’euros celui de la troisième. Seule cette dernière paire serait majoritairement financée (61 %) par EDF.
Un financement public inévitable et nécessaire
La « capacité d’endettement additionnel du groupe très contrainte (…) rend nécessaire une importante intervention de l’État » souligne le Trésor. Contexte rapporte ainsi, toujours d’après le texte officiel, que l’endettement d’EDF pourrait bondir, dans le contexte actuel, de 41,1 milliards en 2019 à EUR 56,9 milliards en 2028.
In fine, l’Etat aurait donc à charge 54% du financement des six installations tandis que que la rémunération d’EDF « sera discutée avec la Commission européenne » et passerait par un tarif d’achat garanti de l’électricité produite, dit « contrat pour différence (CFD)».
Les surcoûts possibles seront majoritairement absorbés par l’Etat
Trois scénarios de répartition des surcoûts seraient à l’étude, plafonnant la prise en charge par l’Electricien à 30 % (au-delà ce sera donc à l’Etat de pallier). Dans les trois scénarios, les tarifs d’achat garanti de l’électricité produite varient entre 51 €/MWh et 56€/MWh.
Il existerait encore un 4ème scénario, aux contours encore peu dessinés, qui s’appuierait sur une prise en charge totale de l’Etat. Le tarif d’achat garanti serait alors de 33€/MWh. En ce cas, EDF passerait « d’investisseur-exploitant » à « constructeur-exploitant ».
Hercule et l’ARENH aux abonnés absents
Le document souligne en préambule que la capacité de financement des EPR sera fonction de la mise en service de l’EPR de Flamanville en 2023. En revanche, ainsi que le souligne Contexte, « Les questions actuelles liées à la restructuration du groupe dans le cadre du projet Hercule, et à la négociation entre l’État et Bruxelles sur la nouvelle régulation du nucléaire existant, restent néanmoins absentes du document du Trésor »
« Seul écho à la réforme de la régulation nucléaire en cours : l’administration s’interroge sur la « robustesse » d’un scénario de financement intégral par l’État, au regard des règles européennes sur les aides d’État. Elle se pose aussi la question de la préservation de l’intégration des rôles de « propriétaire et d’exploitant nucléaire, responsable de la sûreté et interlocuteur de l’ASN », gendarme du nucléaire, dans un tel modèle. »