L’accès régulé à l’énergie nucléaire historique (ARENH) permet aux fournisseurs alternatifs d’énergie d’avoir accès, à moindre frais, à une partie de la production d’électricité nucléaire d’EDF. Mais, plus concrètement, sur quoi repose ce dispositif ? Pourquoi a-t-il été mis en place et quelle est son incidence sur la facture d’électricité des pros ?

Définition de l’ARENH

L’ARENH est un dispositif permet aux fournisseurs d’électricité alternatifs d’obtenir à un prix régulé une partie de l’électricité nucléaire produite par EDF. L’objectif est de permettre aux fournisseurs de rester compétitifs et de protéger les consommateurs contre la hausse du prix de l’électricité.

Le mécanisme de l’ARENH est prévu jusqu’au 31 décembre 2025. La fin de l’ARENH en 2026 devrait laisser la place à un accord fixé entre l’Etat et EDF qui viendra encadrer le prix de l’électricité.

La place de l’énergie nucléaire en France

Pour bien comprendre le dispositif de l’ARENH, il convient d’abord de mesurer la place que prend l’industrie nucléaire dans le paysage français.

Dans les années 1970 suite aux chocs pétroliers, l’Hexagone a décidé de développer les centrales nucléaires afin de devenir indépendant en matière de production d’électricité. Ce choix de privilégier l’atome se ressent encore aujourd’hui.

En France, selon les données 2020 de RTE, 67,1% du mix énergétique est assuré par l’énergie nucléaire. C’est donc l’atome qui fournit en grande majorité les consommateurs en électricité. Il s’agit d’une situation particulière en Europe puisque sur 124 réacteurs européens, 56 appartiennent à la France.

La totalité du parc nucléaire est exploitée par EDF, le fournisseur historique d’électricité. C’est la raison pour laquelle, les autorités publiques ont mis en place l’ARENH via la Loi NOME.

Le fonctionnement de l’ARENH en 2024 : bien comprendre le mécanisme

Dans le cadre de l’ARENH, EDF est obligé de céder tous les ans à un prix fixé par la Commission de Régulation de l’Energie (CRE), 100 TWh d’électricité nucléaire, soit environ un quart de sa production.

Le prix de l’ARENH est de 42 €/MWh en 2024 après avoir atteint 46,5 €/MWh en 2022 pour faire face à la crise énergétique.

Le volume maximal d’ARENH livré aux fournisseurs est porté à 100 TWh/an en 2024. Le plafond était de 120 TWh/an en 2022 après la publication, en mars 2022, du décret n°2022-342.

Les fournisseurs qui souhaitent en bénéficier doivent en faire la demande à la CRE afin de passer un accord cadre avec EDF. Découvrons le processus en détails.

Calcul et évolution du montant de l’ARENH

C’est la CRE qui détermine le montant de l’ARENH. Pour cela, elle se base sur 4 éléments définis par l’Article L337-14 du code de l’énergie. Selon les textes de loi, « Il tient compte  :

  1. D’une rémunération des capitaux prenant en compte la nature de l’activité ;
  2. Des coûts d’exploitation ;
  3. Des coûts des investissements de maintenance ou nécessaires à l’extension de la durée de l’autorisation d’exploitation ;
  4. Des coûts prévisionnels liés aux charges pesant à long terme sur les exploitants d’installations nucléaires de base mentionnées à l’article L594-1 du code de l’environnement. »

Une fois la recommandation de la CRE établie, le gouvernement est libre de l’accepter ou non.

Quel est le montant de l’ARENH en 2024 ?

Le prix de l’ARENH est de 42 €/MWh en 2024 pour un plafond de commande fixé à 100 TWh.

Lors de sa première application, en 2011, le montant de l’ARENH avait été porté à 40 €/ MWh. Il est passé à 42 €/MWh en 2012 et n’a jamais bougé depuis.

Dans le cadre de l’examen du projet de loi d’urgence en faveur du pouvoir d’achat le 21 juillet 2022, l’Assemblée nationale a approuvé une relève du montant de l’ARENH. Celui-ci devrait atteindre « au moins 49,5 euros » par mégawattheure (MWh) dès le 1er janvier 2023. Le Sénat n’a pas approuvé cette mesure.

Le montant de l’ARENH en 2023 reste donc de 42 € le MWh en 2023 comme l’a annoncé la CRE dans son communiqué du 2 décembre 2022.

Quel est le plafond de l’ARENH ?

Le plafond de l’ARENH est de 100 TWh d’électricité par an. Ce plafond peut faire l’objet d’une révision par le gouvernement. Cette relève du plafond est d’ailleurs souvent demandée par les fournisseurs alternatifs, bénéficiaires de l’ARENH. Ils y voient une manière de stabiliser le prix de l’électricité.

Le dispositif ARENH+ : une relève exceptionnelle du plafond de l’ARENH en 2022

Le 13 janvier 2022, le gouvernement a annoncé des mesures pour éviter la flambée des prix de l’électricité. Pour ce faire, il a décidé d’ajouter 20 TWh additionnels d’ARENH sur la période du 1er avril au 31 décembre 2022 au prix de 46,5 €/MWh. Le plafond de l’ARENH sera donc de 120 TWh au total en 2022. Cette mesure s’accompagne d’un blocage du Tarif Bleu pro et résidentiels jusqu’au 1er février 2023 « de telle sorte que la hausse de février 2022 soit plafonnée à 4% pour ces catégories de clients » a fait savoir EDF.

Selon la CRE, le bilan de cette action est positif. Grâce au dispositif ARENH+ et aux tarifs réglementés, 96,8 % de ces consommateurs particuliers ont réussi à conserver un tarif d’électricité similaire, voire identique, à celui d’avant la crise énergétique. Seule une minorité (moins de 0,5 %) a connu une hausse de tarif supérieure à 100 €/MWh par rapport aux niveaux pré-crise. Cette mesure du gouvernement a donc permis de stabiliser les prix.

Qui peut bénéficier de l’ARENH en 2024 ?

L’ensemble des fournisseurs alternatifs peuvent bénéficier de l’ARENH en France. Les fournisseurs alternatifs sont les concurrents d’EDF ayant fait leur entrée sur le marché de l’électricité après l’ouverture à la concurrence.

Quels fournisseurs utilisent l’ARENH aujourd’hui ?

A l’heure actuelle, la totalité des fournisseurs s’approvisionnent en électricité via l’ARENH. Avant la crise de l’énergie, Enercoop et ilek n’y avaient pas recours. La forte hausse des prix sur les marchés de l’énergie leur a imposé de passer par ce mécanisme.

Cela signifie que même les fournisseurs d’électricité verte s’approvisionnent en énergie nucléaire. C’est d’ailleurs parfaitement légal. Cela est rendu possible par le mécanisme des garanties d’origine (GO). En effet, les GO sont des documents électroniques visant à tracer l’énergie. Ils fonctionnent selon le principe suivant  : pour 1 MWh d’énergie consommé par le client d’une offre verte, 1 MWh d’énergie renouvelable est injecté sur le réseau d’électricité.

Les fournisseurs achètent donc d’un côté une certaine quantité d’énergie nucléaire et de l’autre les GO correspondantes au même volume.

Comment sont calculés les droits de chaque fournisseur ?

Chaque fournisseur alternatif d’électricité peut disposer d’un certain volume d’ARENH, déterminé en fonction de :

  • Son portefeuille de clients, à savoir la puissance moyenne consommée par les clients du fournisseur lors des heures creuses ARENH
  • Le coefficient de bouclage. Porté à 0,964 depuis 2015, il représente la proportion de la production nucléaire dans la consommation d’électricité au niveau national.

Un arrêté du 27 juillet 2023 de la CRE modifie le coefficient de bouclage pour les années à venir. A compter du 1er janvier 2024 il sera de 0,844.

Quelles sont les heures creuses de ARENH ?

Les heures creuses ou heures de faible de l’ARENH ont lieu d’avril à octobre, de 1 h à 7 h en semaine, les weekends et les jours fériés. L’ensemble des plages horaires de juillet et août sont également considérées comme des heures de faible demande. Hors de ces tranches horaires, il s’agit des heures pleines du dispositif ARENH.

La demande d’ARENH : les démarches pour les fournisseurs

Pour faire valoir leur droit à l’ARENH, les fournisseurs alternatifs d’électricité doivent passer par la CRE. Pour cela, ils commencent par envoyer un mail à l’adresse suivante : demande-accord-arenh@edf.fr afin de signer un accord cadre avec EDF.

Le fournisseur historique demande alors au fournisseur des pièces justificatives notamment en ce qui concerne les prévisions de consommation et le portefeuille de clients de l’opérateur alternatif.

Une fois les informations reçues, EDF renvoie une version numérique de l’accord-cadre. Charge au fournisseur de l’imprimer et de la retourner signée à EDF. Si le dossier est complet, EDF est alors à même de le signer à son tour.

C’est à la fin de ce processus que le fournisseur demandeur fait parvenir son dossier à la CRE.

Que se passe-t-il si un fournisseur reçoit trop d’ARENH ?

Si un fournisseur reçoit une quantité d’ARENH supérieure à celle justifiée par la consommation réelle de ses clients, un mécanisme rétroactif vient rectifier cet excédent. En d’autre mot, il est tenu de « rembourser » l’excédent perçu. Pour cela, la CRE a mis en place des compléments de prix sur l’électricité attribuée en excès :

  • Complément de prix 1 (CP1): Il annule l’avantage économique reçu par un fournisseur en cas d’attribution d’ARENH excédant la consommation réelle de son portefeuille de clients.
  • Complément de prix 2 (CP2): Il vient pénaliser les fournisseurs aux travers d’une sanction financière lorsque ceux-ci ont réalisé surestimation excessive de leur demande d’ARENH.

En 2023, le montant du CP2 a été fixé à 40 €/MWh alors qu’il était porté auparavant à 20 €/MWh, face à la hausse des prix de l’électricité sur les marchés de gros.

Choisissez votre offre avant le guichet ARENH 2024

Dans le cadre de la crise énergétique, pour pouvoir profiter de la stabilité des prix de l’ARENH, la CRE recommande de souscrire le contrat d’électricité de l’entreprise le plus tôt possible.

L’écrêtement de l’ARENH : qu’est-ce que cela signifie ?

Lorsque la CRE enregistre moins de demandes d’électricité nucléaire que la quantité prévue par la loi, chaque fournisseur reçoit 100% de sa requête. Le volume est proportionnel à son portefeuille de clients. Plus le fournisseur à de clients, plus EDF lui livre de l’électricité nucléaire.

Mais, que se passe-t-il si la CRE reçoit trop de demandes ? A ce moment-là, on procède à un écrêtement de l’ARENH. Chaque fournisseur récupère alors le même pourcentage d’ARENH. Cette situation arrive parfois. Par exemple, la CRE a « a reçu pour l’année 2020 un total de demandes de 147,0 TWh d’électricité formulées par 73 fournisseurs ». Les besoins de chacun ne pouvant être satisfaits, chaque fournisseur a disposé de 68% de sa demande.

Principe de l'écrêtement de l'ARENH

ARENH : historique et évolution des volumes de commande

Avec la hausse des prix de l’électricité pour les entreprises, les volumes de commande de l’ARENH sont en augmentation depuis déjà quelques années. Voici comment a évolué le processus.

ARENH 2024 : le volume de commande et d’attribution

Le 1er décembre 2023, suite au guichet ARENH, la CRE a fait savoir que les fournisseurs alternatifs ont formulé une demande totale de 130,41 TWh. Le taux d’écrêtement de l’ARENH en 2024 est donc porté à 23,32%. Chaque fournisseur recevra 76,68 % de son droit à l’ARENH.

Évolution des commandes ARENH

ARENH 2023 : quel volume de demandes ?

En 2023, l’ARENH subit un nouvel écrêtement. En effet, pour l’année 2023, la CRE a reçu un volume de demande de 148,9 TWh, corrigé à 148,3 TWh. Les 87 fournisseurs ayant effectué leur demande d’ARENH recevront 67,43% de leur droit pour 2023. Dans un contexte déjà marqué par la crise de l’énergie, cela induit une hausse de prix de l’électricité pour les entreprises et les collectivités.

ARENH : quels volumes de commande pour 2021 et 2022 ?

Pour l’année 2021, la Commission de Régulation de l’Energie a reçu au total une demande d’électricité de 146,2 TWh de la part de 81 fournisseurs. En 2022, la demande a subi une hausse d’environ 10% pour atteindre 160 TWh, son record historique.

Pour l’heure la quantité allouée aux fournisseurs à 42€ / MWh reste plafonnée à 100 TWh. Une quantité supplémentaire de 20 TWh est prévue en 2022 au prix de 46,5 € / MWh.

L’impact de l’ARENH sur la facture des professionnels

Le montant de l’ARENH a un impact sur la facture d’électricité des entreprises et des collectivités. En effet, il joue sur les tarifs de l’électricité. Regardons comment le mécanisme influe sur les dépenses des pros.

Énergie nucléaire et calcul des tarifs réglementés de l’électricité

Premièrement, le montant de l’ARENH est pris en compte par la CRE pour établir le tarif réglementé de vente (TRV) de l’électricité, ou « Tarif Bleu » d’EDF. Pour l’heure, il reste le tarif le plus souscrit en France.

Tarif de référence sur le marché, il entraîne avec lui une partie du marché, notamment les offres à tarifs indexés. En cas de hausse ou de baisse de l’ARENH, les contrats d’électricité des professionnels peuvent alors varier.

De quelle part d’ARENH peut bénéficier une entreprise ?

La quantité d’électricité ARENH à laquelle un site peut prétendre est influencée par son schéma de consommation, notamment sa consommation durant les périodes spécifiques définies comme « heures ARENH ».

Comme l’explique le fournisseur EDF « C’est sur la base de cette consommation et en appliquant les modalités de calcul prévues par les textes encadrant le dispositif ARENH que la part de votre électricité éligible à l’ARENH pourra être déterminée. »

Ecrêtement de l’ARENH et hausse des prix

Nous l’avons dit, l’ARENH est plafonné à 100 TWh. Lorsque les demandes excèdent la quantité prévue par l’Etat, les fournisseurs sont alors obligés d’aller se fournir ailleurs. Comme l’explique EDF, chaque fournisseur « compense le volume d’ARENH écrêté en achetant ce volume d’électricité et la part capacité manquante (l’ARENH intégrant la part capacité associée) à prix de marché. Le prix du contrat de fourniture est donc modifié pour tenir compte de ces achats complémentaires sur le volume écrêté. ».

Ils peuvent aller négocier des prix avec des producteurs d’énergies vertes ou passer par les marchés de gros. Bien souvent les prix y sont plus élevés. Dès lors, un écrêtement de l’ARENH se traduit la plupart du temps par une hausse des factures d’électricité. C’est pourquoi, de nombreux fournisseurs engagent l’Etat à relever le plafond de l’ARENH à 150 TWh.

Selon les acteurs alternatifs du marché, relever le plafond leur permettrait d’obtenir 100% de leur demande et stabiliserait les prix.

Une réduction du coefficient de bouclage en 2024 et 2025

L’évolution du coefficient de bouclage concerne la manière dont est calculée la part d’électricité d’ARENH à laquelle les consommateurs finaux en France peuvent avoir accès. Le but de ce coefficient est d’assurer que la demande totale en droits ARENH ne dépasse pas la capacité de production nucléaire du pays.

En juillet 2023, un arrêté a réduit la valeur de ce coefficient de 0.964 à 0.844 pour les années de livraison 2024 et 2025. Cette réduction signifie que les consommateurs finaux auront droit à moins d’électricité au tarif ARENH durant ces années, ce qui entraîne une diminution des demandes d’ARENH par les fournisseurs d’énergie alternatifs. Cela permet d’ajuster les droits ARENH de la production prévisionnelle du parc nucléaire français.

Droit d’ARENH et faillite d’un fournisseur ?

Dans un contexte de crise énergétique, certains fournisseurs d’électricité ont pu faire faillite. Ca a été le cas d’Hydroption par exemple. Dans une délibération parue en novembre 2022, la CRE fait savoir que « les volumes initialement alloués au fournisseur défaillant reviennent à EDF conformément au cadre réglementaire existant. ».

En effet, EDF a été sélectionné comme fournisseur de secours. En cas de faillite ou d’interdiction d’exercer de leur fournisseur, les professionnels et particuliers sont rebasculés automatiquement chez EDF pour éviter la coupure de courant.

Quelles alternatives à l’ARENH pour les fournisseurs ?

L’achat sur les marchés

Les fournisseurs qui souhaiteraient ne pas utiliser l’ARENH peuvent acheter de l’électricité à d’autres acteurs. Ils peuvent ainsi passer par les marchés de gros de l’électricité ou signer des contrats avec des producteurs d’énergie renouvelable.

La production en propre

Il peuvent aussi développer leurs infrastructures de production pour ne pas avoir à acheter à un tiers l’électricité. C’est ce que beaucoup ont choisi de faire. Toutefois, ils continuent tout de même à s’approvisionner auprès de producteurs.

Comprendre l’ARENH à travers l’ouverture à la concurrence et la Loi NOME

Pour comprendre les détails du mécanisme, il faut revenir sur l’histoire de l’ouverture à la concurrence. Celle-ci a commencé en 1999, date à laquelle les entreprises consommant plus de 100 GWh d’électricité ont peu changé de fournisseur.

Elle s’est poursuivie avec l’ouverture en 2004 de l’électricité à tous les professionnels et collectivités.

Puis, en 2007, le segment des particuliers s’est libéralisé à son tour. C’est pour accompagner la libéralisation du marché qu’a été créé l’ARENH. Explications.

Prix de marché et TarTAM : les débuts de la concurrence

Dans les années 2000, le marché est ouvert pour les industriels. Ils peuvent alors opter pour le « tarif vert », le tarif réglementé de vente d’EDF ou passer en offre de marché.

A ce moment-là, beaucoup décident de quitter EDF. En effet, l’électricité thermique a atteint un prix très bas. Le baril de pétrole coûte environ 20 $. Le charbon et le gaz naturel présentent eux aussi des coûts très avantageux.

Pour se faire une place, les fournisseurs d’électricité pour les industries tentent de casser les prix du marché en proposant de l’électricité thermique.

Tout se passe plutôt bien jusqu’en 2004. Mais cette année-là, les prix des hydrocarbures remontent. Dès 2005, les tarifs de marché de l’électricité suivent et perdent toute leur compétitivité. Les industriels souhaitent alors revenir aux tarifs verts. Mais, à l’époque, cela est interdit par le droit européen.

Ils se tournent alors vers les élus de l’Assemblée Nationale et du Sénat afin de pouvoir bénéficier d’une énergie nucléaire stable et peu coûteuse. En 2006, est alors voté le tarif réglementé transitoire d’ajustement du marché (TaRTAM). Il s’agit d’un tarif réglementé majoré par rapport au tarif vert mais au coût raisonnable.

Aux yeux de la Commission européenne, ce système fausse le jeu de la concurrence. Celle-ci engage alors une procédure contre la France en juin 2007.

La Commission Champsaur : aux origines de l’ARENH

Pour faire face aux attentes de l’Union européenne, en 2008, le gouvernement Fillon demande à une commission de plancher sur des solutions permettant d’allier concurrence et production nucléaire française.

Composée de quatre parlementaires et de quatre experts, elle sera présidée par Paul Champsaur. En 2009, elle remet son premier rapport à Jean Louis Borloo, ministre de l’Ecologie et Christine Lagarde, alors ministre de l’Economie.

Ce rapport propose, entre autres, l’instauration d’un accès régulé à l’énergie nucléaire et hydraulique d’EDF pour les fournisseurs alternatifs. Par ce biais, ils peuvent se fournir dans des conditions similaires à celles du fournisseur historique.

La Loi NOME : une réforme en profondeur du marché français

Les ministres se fondent sur le rapport de la commission Champsaur pour rédiger le projet de loi portant Nouvelle organisation du marché de l’électricité (Loi NOME). Elle vise à améliorer le jeu de la concurrence sur le marché français, au bénéfice du consommateur. Promulguée le 7 décembre 2010, cette loi entre en vigueur au 1er juillet 2011.

Elle permet l’introduction de 3 grandes mesures :

  • Le principe de réversibilité : les consommateurs peuvent revenir à tout moment aux tarifs réglementés du fournisseur historique, à savoir les tarifs Vert, Jaune et Bleu d’EDF.
  • Le mécanisme de capacité : dans les grandes lignes, il oblige les fournisseurs à être en mesure de répondre à la demande en électricité de leurs clients en détenant des moyens de production propres, en disposant de capacités auprès d’un ou plusieurs producteurs, ou en ayant recours à l’effacement.
  • L’ARENH (Accès Régulé à l’Énergie Nucléaire Historique) : les fournisseurs alternatifs peuvent acheter de l’électricité nucléaire dans des « conditions économiques équivalentes » à celles d’EDF. Ce dispositif court de 2011 à 2025.

Bon à savoir

Le principe de réversibilité est en voie de disparition en effet, le « Tarif vert » (pour les puissances souscrites supérieures à 250 kVA) et le « Tarif Jaune » (pour les puissances souscrites comprises entre 36 et à 250 kVA) ont été supprimés en 2016. Le Tarif Bleu a quant à lui partiellement disparu au 31 décembre 2020, avec la fin des tarifs réglementés pour les entreprises.

ARENH 2020 et Covid-19

Pour la première fois depuis le lancement du mécanisme, certains fournisseurs ont souhaité renoncer à l’ARENH en 2020 après avoir passé commande.

En effet, en lien avec l’épidémie de coronavirus, les prix de l’électricité se sont effondrés sur les marchés de gros. Total Direct Energie, Alpiq et Gazel ont fait jouer la « clause de force majeure » prévue par l’accord cadre pour renoncer à la livraison d’électricité nucléaire. EDF a d’abord refusé mais le Tribunal de Commerce de Paris en a décidé autrement. Le fournisseur historique est donc contraint de suspendre le contrat.

Reste à savoir ce que feront les fournisseurs en cas de remontée des prix à l’hiver sur les marchés. Ils pourraient alors devoir renégocier des tarifs avec EDF.

Fin de l’ARENH en 2025 : une révision du dispositif ?

L’année 2025 approche et les autorités doivent penser à une réforme de l’ARENH. Pour cela, plusieurs propositions avait été faites. Le 14 novembre 2023, un accord a été trouvé entre EDF et Bruno Le Maire, Ministre de l’économie sur la fin de l’ARENH.

Quel dispositif pour le prix de l’électricité nucléaire en 2026 ?

L’Etat et EDF se sont mis d’accord sur un prix de référence de l’électricité nucléaire autour de 70 € /MWh. Les autorités appliqueront un taxe avec un montant progressif. Lorsque le prix moyen du nucléaire dépassera 78 à 80 € / MWh, 50% des revenus supplémentaires générés par EDF seront redistribués. Lorsque le prix dépassera 110 €, ce pourcentage passera à 90%.

Un maintien de l’ARENH

D’autres pistes avaient été retenues, celles du maintien d’un mécanisme relativement similaire. Le plafond et le montant pourraient être relevés et passer par exemple, à 150 TWh avec un prix du MWh fixé à 45 €.

Un corridor de prix

Une autre solution aurait être la mise en place d’un « corridor de prix ». Fixant un prix plafond et un prix plancher. Selon Reuters, « le gouvernement prévoit en outre un écart de 6 euros par MWh entre le plancher et le plafond du « corridor » de prix envisagé ». Il incluait la production des centrales nucléaires en fonctionnement dont l’EPR de Flamanville. Dans ce scénario, sur le marché, si le prix spot du nucléaire dépassait celui du plafond, EDF aurait du rétrocéder la différence aux opérateurs alternatifs. A l’inverse, si le prix spot passait en dessous du plancher, les fournisseurs alternatifs devraient s’acquitter de la différence à EDF.

Caroline Dusanter
Caroline Dusanter

Diplômée d’un Master 2 du CELSA-Paris Sorbonne, Caroline s’est lancée comme rédactrice et chargée de communication éditoriale indépendante en 2017. Intéressée par les problématiques liées à la transition énergétique et à la mobilité, elle travaille avec Opéra Énergie depuis 2019.

Experte sur les problématiques liées à l'énergie et la rénovation énergétique, elle ambitionne à travers ses articles de faire de la pédagogie sur le marché du gaz et de l’électricité, en constante évolution.