Budget 2025 : taxation inédite de l’électricité, fin de l’ARENH…
Quelles sont les mesures liées à l’énergie présentées dans le projet de loi de finances (PLF) 2025 qui auront un impact direct sur les entreprises, les collectivités et les ménages ?
Une hausse sans précédent de la fiscalité sur l’électricité
L’article 7 du PLF 2025 prévoit une augmentation sans précédent de l’accise sur l’électricité, applicable dès février 2025, avec une hausse probable de l’ordre de 10 €/MWh.
Bien que les taux définitifs ne soient pas encore établis, ils seront fixés de manière à limiter la baisse du Tarif Réglementé de Vente (TRVe) à 9 %.
Seuls les industriels électro-intensifs pourront continuer à bénéficier d’un taux réduit jusqu’au 31 décembre 2025, sous réserve d’en faire la demande.
Un contresens écologique et social
Dans une lettre ouverte adressée aux députés et sénateurs ce mercredi, seize fédérations et associations professionnelles ont dénoncé cette augmentation.
« Cette fiscalité qui représente d’ores et déjà près d’un tiers du montant total de la facture d’électricité, pourrait en constituer demain le premier poste, induisant que les consommateurs d’électricité contribuent plus au budget de l’Etat qu’au bien et service qu’ils consomment », écrivent ces fédérations du secteur de l’énergie.
« Le projet présenté par le gouvernement entend procéder à une augmentation globale de l’accise de l’électricité à un niveau jamais atteint jusqu’ici, ce qui constituerait un contresens écologique », critiquent-elles.
« Au-delà des quelque 300 industriels électro-intensifs protégés, des milliers d’entreprises engagées dans la décarbonation de leur activité vont devoir payer leur électricité plus cher. » rappelle également l’édito des Echos de ce matin.
Hausse de la TVA sur le gaz naturel et l’électricité
Autre mesure marquante, le PLF 2025 supprime les taux réduits de TVA sur les abonnements électricité et gaz naturel. Si cette suppression n’aura pas d’impact direct sur les entreprises capables de récupérer la TVA, elle pèsera lourdement sur les copropriétés, collectivités et hôpitaux.
Vers une réduction de l’accise sur le gaz naturel ?
Toujours dans l’article 7 du PLF 2025, il est envisagé une baisse de l’accise sur le gaz naturel à partir de janvier 2025. Le taux final reste encore à définir, car il doit prendre en compte une majoration destinée à financer la péréquation tarifaire dans les Zones Non Interconnectées (ZNI), telles que la Corse et les DOM.
Cette baisse n’est pas du goût de tous au sein du gouvernement, mais Laurent Saint-Martin, ministre du Budget, a de nouveau confirmé le 15 octobre qu’il n’y aurait pas d’augmentation des taxes sur le gaz.
Le versement nucléaire universel prend la place de l’ARENH
Le projet de loi confirme la suppression de l’Accès Régulé à l’Électricité Nucléaire Historique (ARENH) à la fin de 2025, remplacé par le Versement Nucléaire Universel.
Ce mécanisme vise à protéger les consommateurs contre les hausses excessives des prix de l’électricité.
Si le prix de vente de l’électricité nucléaire dépasse certains seuils, EDF sera taxée à hauteur de 50% ou 90% de ses revenus supplémentaires. Le produit de cette taxe sera ensuite redistribué aux consommateurs sous la forme d’un versement nucléaire universel, protégeant les ménages et entreprises face à la hausse des prix.
Cependant, dans les conditions actuelles du marché, ce mécanisme semble moins favorable aux consommateurs.
Alors que l’ARENH garantissait un prix fixe à 42 €/MWh pour une partie de l’approvisionnement, le nouveau système basé 100 % sur le prix de marché pourrait entraîner une augmentation significative des factures.
Matignon reconnait une possible hausse des prix avec la fin de l’ARENH
Certains parlementaires, qui avaient préconisé à l’issue d’une enquête sénatoriale un autre mécanisme, expriment d’ores et déjà leurs préoccupations quant au potentiel effet inflationniste de cette mesure.
Selon le Point, qui y a eu accès, des éléments de langage diffusés par Matignon à ses ministres viennent étayer ces craintes : « Cette mesure peut conduire à une augmentation des prix de l’électricité pour le consommateur », stipule ainsi une note envoyée à Bercy.
Ces inquiétudes font écho aux alertes lancées, depuis plusieurs mois maintenant, par nombre d’entreprises qui pointent la complexité d’un système basé sur une redistribution a posteriori, dans un contexte de prix volatils.
Le CLEEE déclarait, par exemple, en juillet dernier que le mécanisme « n’apporte aucune visibilité aux entreprises et compromet gravement les perspectives de réindustrialisation du pays ».
Cri d’alerte des industriels
C’est dans ce contexte que France Chimie a publié ce jour un communiqué de presse dénonçant la « crise inédite » traversée par l’industrie, « au niveau européen comme en France ».
« Des emplois ont déjà été détruits et, sans action résolue des pouvoirs publics, environ 15 000 emplois directs seraient menacés en France » prévient France Chimie qui demande notamment au gouvernement de revoir sa copie sur le post ARENH, afin d’adopter un dispositif « qui réponde aux besoins de compétitivité de toute la Chimie. »
« Le secteur constate qu’après près d’un an de discussions, un écart substantiel demeure entre les propositions d’EDF et les contraintes de compétitivité des industriels en France quant aux niveaux de prix des futurs contrats long-terme de 10 à 15 ans, condition sine qua non des investissements de décarbonation à engager. » explique le communiqué.
« En complément, les sites industriels ont besoin d’une offre de moyen-terme (3 à 5 ans) concurrentielle et suffisante et d’un mécanisme de protection contre de futurs épisodes de volatilité spéculative de l’énergie en Europe. » est-il encore ajouté.