À partir du 1er janvier 2026 et jusqu’au 31 décembre 2030, la 6ème période des CEE s’annonce comme un tournant majeur dans la politique d’efficacité énergétique française. Volume d’obligation en hausse, recentrage sur des opérations à fort impact, exigences de qualité renforcées, le dispositif des CEE évolue en profondeur. Pour les collectivités, industriels, copropriétés, acteurs du tertiaire ou du monde agricole, comprendre ces nouvelles règles en préparation permettra de continuer à mobiliser efficacement des CEE.

Rappels sur le dispositif des CEE et la notion de période

Avant d’analyser les ambitions de la 6eme période CEE, il est utile de rappeler les fondements du dispositif des CEE et le rôle structurant que joue chaque période.

6ème période des CEE : retour sur le dispositif des CEE

Instauré par la loi POPE de 2005, le dispositif des certificats d’économies d’énergie (CEE) constitue l’un des principaux leviers de la politique française de maîtrise de la demande énergétique.

Il repose sur une logique d’obligation. Les fournisseurs d’énergie (appelés « obligés CEE ») doivent inciter les consommateurs (particuliers, entreprises et collectivités) à réaliser des économies d’énergie.

Les économies réalisées permettent de générer des CEE, exprimés en kilowattheures cumulés actualisés (kWh cumac), qui sont rachetés ou échangés sur le marché.

En contrepartie, les consommateurs perçoivent des primes énergie dont le montant varie selon le barème de valorisation des CEE de chaque fournisseur d’énergie.

P6 : à quoi correspond une période CEE ?

Le dispositif des CEE est structuré en périodes pluriannuelles, fixées par arrêté, qui définissent un volume national d’économies d’énergie à atteindre.

En cours, la cinquième période des CEE (P5) s’étend de 2022 à 2025, avec un objectif initial de 2 500 TWh cumac, augmenté à 3 100 TWh cumac en octobre 2022.

À chaque période, les règles peuvent évoluer, à travers des modifications de fiches d’opérations standardisées (FOST), la révision des contrôles qualité, le niveau des primes, etc., afin de mieux répondre aux enjeux énergétiques, économiques et climatiques de la France.

6ème période CEE : quels sont ses objectifs et les principales évolutions à partir du 1er janvier 2026 ?

6eme période des CEE (P6)

Outre l’augmentation de l’obligation, la sixième période CEE devrait amorcer une transformation profonde du dispositif. Amélioration de la qualité, élargissement du périmètre, transparence renforcée, les règles évoluent pour parer aux fragilités constatées durant la P5 et restaurer la crédibilité du système.

Une obligation en nette hausse

La 6 ᵉ période des CEE s’étendra du 1ᵉʳ janvier 2026 au 31 décembre 2030.

L’objectif global devrait être fixé à 5 250 TWh cumac, soit 1 050 TWhc par an. Cela représente une hausse de près de 70 % de l’obligation nationale par rapport à la P5.

L’État entend ainsi maintenir une ambition forte, tout en stabilisant les règles sur toute la période.

CEE : zoom sur l’impact de P5 sur la conception de P6

durant la 5 ᵉ période, le niveau d’obligation a été porté à 3 100 TWhc. Toutefois, la multiplication d’opérations peu encadrées a conduit à une surproduction de certificats avec pour conséquence une chute des prix et une perte de valeur du dispositif. Avec la P6 CEE, l’État opte pour un recentrage qualitatif : plus d’exigence, plus de transparence.

P6 CEE : des paramètres structurants en évolution

Au-delà des volumes, plusieurs règles fondamentales devraient être modifiées pour améliorer la robustesse du dispositif des CEE pendant la période 6 CEE :

  • prolongation des bonifications ZNI, du contrat de performance énergétique (CPE), de certains coups de pouce, de certaines fiches transport et récupération de chaleur fatale dans l’industrie, etc. ;
  • abaissement des seuils de franchise avec davantage de fournisseurs de fioul, de GPL et de carburants qui seront désormais soumis à l’obligation ;
  • répartition par vecteur énergétique basée sur les ventes réelles 2021–2023 et les prévisions de la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) 2024–2033 ;
  • volume constant sans aucun palier progressif, contrairement aux périodes précédentes.

Renforcement de la part précarité : parmi les 5 250 TWhc visés, 1 400 TWhc seront dédiés aux ménages en situation de précarité énergétique, soit plus de 26 % de l’obligation totale. Cette priorité sociale s’accompagne d’un fléchage plus rigoureux vers les logements énergivores et les territoires les plus vulnérables.

Un encadrement renforcé des opérations grâce à la sixième période des CEE

La 6ème période CEE s’inscrit dans une logique de montée en qualité.

Le projet de décret prévoit un renforcement des contrôles sur :

  • les pièces justificatives transmises ;
  • les opérations sur site ;
  • la conformité des intervenants.

Les contrôles seront ajustés au niveau de risque identifié avec pour objectif de s’assurer que chaque certificat reflète une économie d’énergie réelle, mesurable et vérifiable.

Rappel sur le projet de décret relatif à la 6 ᵉ période CEE

Mis en consultation publique du 21 juillet au 10 août 2025, le décret encadrant la P6 précise les modalités du dispositif 2026–2030. Il fixe les volumes, les coefficients, les critères de pondération, les seuils de franchise et les règles de délégation. L’entrée en vigueur est prévue au 1ᵉʳ janvier 2026 pour assurer une continuité réglementaire sans rupture avec la période précédente.

Une actualisation progressive des fiches standardisées

Si le catalogue des FOST ne sera pas intégralement revu à court terme, plusieurs évolutions sont attendues :

  • réduction des forfaits pour des opérations jugées trop rentables (ex. : isolation de combles, calorifugeage, etc.) ;
  • renforcement des fiches industrie et rénovation globale ;
  • meilleur ciblage des primes selon l’efficacité énergétique réelle et le niveau d’économie généré.

Cette logique la 6ème période CEE vise à réorienter les aides vers des travaux plus globaux et à limiter les effets d’optimisation sans gain énergétique significatif.

Emmy+ : vers une gestion numérique plus robuste

La plateforme Emmy permet l’enregistrement et la gestion administrative des certificats, mais elle reste limitée à un rôle déclaratif.

En cours de déploiement pour la P6 CEE, la version Emmy+ vise à professionnaliser la gestion du dispositif des CEE avec :

  • une interconnexion avec d’autres bases énergétiques ;
  • une automatisation partielle des contrôles ;
  • des tableaux de bord de suivi du risque ;
  • une meilleure traçabilité des documents et des audits.

Ce nouvel outil devrait contribuer à limiter les fraudes, à fluidifier les procédures et à renforcer la transparence sur l’ensemble du processus.

6ème période CEE : quel devrait être son impact sur le prix et le volume des CEE ?

Derrière les ambitions chiffrées de la 6 ᵉ période CEE, c’est toute la dynamique économique du dispositif qui pourrait être redéfinie. Prix, volumes, équilibre du marché, les conséquences s’annoncent significatives pour les acteurs concernés.

Un volume d’obligation revu à la hausse

Le Comité de pilotage du 2 juillet 2025 a validé une obligation annuelle de 1 050 TWh cumac, soit 5 250 TWhc pour l’ensemble de la période 2026-2030 afin de relancer la dynamique du dispositif.

Le recentrage sur des opérations plus qualitatives et contrôlées pourrait limiter le volume de certificats effectivement valorisables.

Pour la 6ème période CEE, c’est une situation propice à une hausse du prix moyen des CEE, notamment sur le marché secondaire.

Moins d’opérations génératrices de CEE

Le renforcement des contrôles et la réduction des forfaits sur certaines FOST risquent de freiner la génération de CEE à bas coût.

Avec un besoin global en hausse, mais un volume valorisable plus faible, une tension supplémentaire se crée sur l’offre disponible.

Un effet prix potentiellement plus fort que l’effet volume

Dans le cadre des travaux du Groupe de travail P6 (GT P6), piloté par les pouvoirs publics avec les parties prenantes du dispositif, TotalEnergies a présenté un scénario d’impact tarifaire. Le doublement de l’obligation sur les carburants pourrait faire passer le coût du certificat de 0,16 à 0,25 €/litre.

Ainsi, dans un marché sous tension, l’effet prix, lié à l’équilibre offre/demande, pourrait peser davantage que l’effet volume sur le coût final pour les obligés, notamment dans les secteurs peu flexibles.

Et après la 6ème période P6 ?

La programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) s’attachera dès 2027-2028 à définir si une période P7 sera mise en œuvre sur la période 2031-2035 et le niveau d’obligation y relatif.

Quelles sont les implications de la 6ème période CEE secteur par secteur ?

La 6 ᵉ période CEE modifie sensiblement les conditions de valorisation selon les secteurs. Pour chaque profil d’acteur, la stratégie CEE est à repenser.

Pour les bâtiments tertiaires

Les opérations les plus simples, comme le relamping ou le remplacement ponctuel de ventilation, verront leur rentabilité baisser pendant la 6ème période CEE.

À l’inverse, les investissements en gestion technique, pilotage énergétique ou rénovation performante resteront porteurs.

Ainsi, la cohérence des opérations CEE avec le décret tertiaire devient un levier incontournable pour sécuriser des volumes de CEE significatifs en P6.

Pour les industriels

Les fiches spécifiques (air comprimé, moteurs IE3, récupération de chaleur) restent mobilisables pendant la sixième période CEE, mais leur encadrement se durcit.

Ainsi, l’accompagnement par des experts sera décisif pour assurer la validation des justificatifs et pour répondre aux exigences de contrôle.

En ce sens, une stratégie de valorisation par site ou par groupe d’installations permettrait d’optimiser les démarches.

Pour les copropriétés

En P6 CEE, les opérations ponctuelles (chauffage, calorifugeage) généreront moins de certificats qu’en P5.

Soutenue par MaPrimeRénov’ Copropriété, la rénovation globale sur base d’un audit énergétique devient la voie prioritaire.

En outre, l’appui d’un AMO ou d’un bureau d’études thermiques permettra de monter des dossiers conformes, éligibles et bien valorisés, en particulier sur le volet précarité.

Pour les collectivités

La baisse des forfaits annoncée sur les fiches les plus utilisées en collectivité réduit l’effet de levier des opérations classiques.

Pour compenser, miser sur des projets d’ensemble semble pertinent : groupement de bâtiments, relance d’audits ou déploiement de GTB.

À nouveau, l’accompagnement par des partenaires tiers peut en faciliter la mise en œuvre.

Pour le secteur agricole

L’agriculture devrait conserver ses fiches d’opérations standardisées (pompage performant, récupération de chaleur, motorisation, etc.). Toutefois, la baisse des volumes valorisables incite à hiérarchiser les investissements vers les solutions à fort gain énergétique.

Ainsi, les porteurs de projets devront justifier la performance réelle des équipements installés et anticiper les exigences documentaires. Une veille technique et une aide à la décision deviennent utiles pour sécuriser les dépôts.

Quel est le calendrier de préparation de la 6ème période CEE ?

Le passage de la P5 à la 6ème période CEE se prépare de manière progressive afin d’assurer la continuité du dispositif.

Voici les étapes principales à retenir :

Février 2023 à juin 2025Tenue des groupes de travail (GT P6) entre l’État, les obligés, les experts et les acteurs de terrain pour co-construire les modalités de la P6 CEE
21 juillet au 10 août 2025Consultation publique sur le projet de décret fixant les règles de la 6 ᵉ période (volumes, seuils de franchise, coefficients, exigences qualité, etc.)
Automne 2025Publication du décret au Journal officiel et diffusion des textes réglementaires d’application
Fin 2025Ouverture des comptes pour les nouveaux acteurs obligés et mise en service progressive des outils Emmy+
1ᵉʳ janvier 2026Entrée en vigueur officielle de la 6 ᵉ période CEE pour une durée de cinq ans (jusqu’au 31 décembre 2030)

Comment Opéra Énergie accompagne les professionnels dans cette sixième période CEE ?

Mandataire CEE, Opéra Énergie accompagne les acteurs publics et privés dans la mobilisation du dispositif des CEE à chaque étape.

Nous aidons nos clients à identifier les opérations les plus rentables et à structurer les dossiers dans le respect des nouvelles exigences réglementaires. En outre, nos experts négocient les primes énergie pour optimiser le financement des travaux dans tous les secteurs d’activité.

Avec l’arrivée de la 6ème période CEE, notre rôle consiste aussi à assurer une veille technique et réglementaire pour garantir la conformité des démarches et sécuriser la valorisation des certificats, dans un cadre plus exigeant et sélectif qu’en P5.

Diplômée d'un master en environnement, Alexandra a exercé pendant quinze ans dans des bureaux d'études techniques.

Depuis 2019, elle est rédactrice web spécialisée sur les sujets liés à l'énergie et l'environnement. Passionnée par les enjeux de la transition énergétique, elle associe sa plume à son expertise pour rédiger des contenus qui répondent aux enjeux des entreprises.