Les industriels sont aujourd’hui confrontés à une problématique complexe : comment booster leur activité, optimiser leur compétitivité tout en prenant en compte les impératifs environnementaux ?

Une partie de la réponse se trouve dans l’optimisation de leur performance énergétique, d’autant qu’il est aujourd’hui avéré que cette dernière peut soutenir la productivité et inversement.

Performance énergétique de l’industrie française : état des lieux

On le sait, les process industriels sont énergivores, puisque très consommateurs de vapeur, de gaz comprimé, de froid… avec en haut du podium les procédés thermiques (four, séchoir, …). La question de la performance énergétique des industries est donc cruciale si le secteur veut réussir sa transition énergétique.

Industriels : des profils énergétiques multiformes

L’industrie ne pourrait se résumer à un seul et unique profil énergétique et le poids des achats d’énergie dans la valeur ajoutée produite est fonction du type d’industries concernées.

Traditionnellement, on distingue ainsi trois catégories :

  • les entreprises de production de produits semi-finis, situées sur l’amont de la chaîne industrielle (industrie dite lourde) : métallurgie (production d’acier, d’aluminium, etc.), clinker, papier-carton, chimie, verre plat, etc. Ces produits ont vocation à être transformés dans le processus de production pour fabriquer des biens de consommation ;
  • les fabricants de biens d’équipements industriels (machines-outils, séchoirs, fours, etc.). Ces équipements sont utilisés pour produire d’autres biens ;
  • l’industrie des biens de consommation (automobile, textile, produits agroalimentaires). Elle se situe en aval de la chaîne industrielle. Par exemple, le secteur de l’automobile génère un volume d’activité important pour la production des composants constitutifs : aluminium, acier, machines, pièces usinées, pièces plastiques, etc.

C’est dans l’industrie des biens semi-finis que la part des achats d’énergie dans la valeur ajoutée pèse le plus et, en particulier, dans la chimie qui représente 22% des consommations énergétiques finales totales. La sidérurgie fait aussi la course en tête des industries les plus énergivores avec 17 %, suivie de près par l’agroalimentaire (14 %) et les produits minéraux (13 %). Certains chiffres sont particulièrement éloquents : aujourd’hui, 5 % de l’ensemble des sites industriels de France de plus de 10 salariés consomme plus de 80 % de l’énergie.

En dix ans, le mix énergétique final de l’industrie a peu évolué. En 2015, l’électricité représente 35 % du mix, part quasi égale à celle du gaz (34 %). Le charbon suit à 17 %. La part du pétrole a néanmoins reculé, passant de 12 % en 2005 à 7 % en 2015. Quant aux énergies renouvelables, elles ont vu leur part augmenter de 3,5 % en 2005 pour atteindre 6 % en 2015.

Performance énergétique des industriels : quelle est la politique française ?

Nombre de mesures réglementaires et fiscales ont été mises en place par le gouvernement pour soutenir la performance énergétique des industriels français.

Des instruments de marché

Il s’agit notamment de la directive européenne 2003/87/CE établissant un système d’échange de quotas d’émissions de gaz à effet de serre au sein de l’Union européenne.

Lancé en en 2005, le SEQE-UE est non seulement le 1er système mondial d’échange international de quotas d’émission mais il s’impose aussi comme le plus grand mécanisme d’échange de droits d’émission du monde. A lui seul, il représente plus de trois quarts des échanges internationaux de carbone.

Ce système « fonctionne dans 31 pays (les 28 États membres de l’UE plus l’Islande, le Liechtenstein et la Norvège); limite les émissions de plus de 11 000 installations grandes consommatrices d’énergie (centrales électriques et industries) et des compagnies aériennes reliant les pays participants; couvre environ 45 % des émissions de gaz à effet de serre de l’UE » (source https://ec.europa.eu/).

Des mesures incitatives

L’Etat a mis en place des dispositifs incitatifs invitant les industriels à optimiser leur performance énergétique.

Les certificats d’économie d’énergie

Créé en 2006, le dispositif des Certificats d’économie d’énergie permet aux industriels de recevoir une prime de la part d’un fournisseur d’énergie en contrepartie de travaux éligibles aux CEE. Outre une économie d’énergie, les travaux financés par les CEE contribuent à d’autres avantages, comme l’optimisation du process de fabrication ou bien l’installation d’un système de mesure de la performance énergétique.

ISO 50 001

Cette certification atteste d’un système de management de l’énergie de qualité et donc d’un meilleur usage de l’énergie. Elle est particulièrement indiquée pour les électro intensifs qui, lorsqu’ils sont certifiés ISO 50 001, peuvent prétendre à une réduction du Turpe pouvant aller jusqu’à 90 % !

Le fonds chaleur

Dispositif lancé en 2009 par l’ADEME, dans le cadre du Grenelle de l’environnement, le Fonds Chaleur ou Fonds Chaleur Renouvelable soutient le financement de projets de production de chaleur à partir d’EnR et d’énergies de récupération, ainsi que les réseaux de chaleur liés à ces installations.

Des mesures réglementaires

Plusieurs mesures réglementaires viennent favoriser la performance énergétique des industriels. L’une des plus importantes est la transposition de la directive 2012/27/UE relative à l’efficacité énergétique (DEE) qui a rendu obligatoire :

  • un audit énergétique tous les 4 ans
  • l’analyse coûts/bénéfices des installations génératrices de chaleur fatale

Booster la performance énergétique en décarbonant les industries

Pour les industriels, la décarbonation est un levier de performance énergétique mais aussi économique et de notoriété. Elle leur permettra en effet de se démarquer par la maitrise de leur empreinte carbone et de réduire leur sensibilité à la volatilité des prix des énergies fossiles tout en s’imposant comme leaders de la transition énergétique. En France, près de 20 % des émissions de gaz à effet de serre sont issues des activités industrielles. Dans ce contexte, le gouvernement a lancé un plan de décarbonation de l’industrie qui s’inscrit dans l’objectif fixé par la Stratégie Nationale Bas Carbone (SNBC) de neutralité carbone à l’horizon 2050. Une enveloppe de 1,2 milliards d’euros d’ici 2022 sera ainsi allouée aux industriels pour permettre l’investissement dans des équipements moins polluants en termes de CO2. L’ADEME a ainsi lancé en septembre 2020 son 1er appel à projets d’efficacité énergétique des procédés et des utilités dans l’industrie.

Contrat de performance énergétique, un levier à activer

Lancé par l’Union européenne en 2006, le Contrat de Performance Énergétique (CPE) a été transposé en droit français en 2009 dans le cadre du Grenelle de l’environnement.

Un Contrat de Performance Energétique industriel est un contrat passé entre un industriel et un opérateur d’efficacité énergétique.

Le Contrat de Performance Energétique ne porte pas sur les travaux en eux-mêmes mais bien sur les économies d’énergie qu’ils permettront de réaliser. Dans la mise en œuvre, le CPE détaille donc les actions d’efficacité à réaliser, qu’elles portent sur l’amélioration des performances du bâti, sur la fourniture d’énergie ou sur l’optimisation de l’efficacité énergétique des équipements (systèmes de ventilation, chauffage, production, éclairage, etc.) comme des des process industriels.

Il contractualise également le niveau d’amélioration de l’efficacité énergétique à atteindre : il s’accompagne ainsi d’objectifs d’optimisation gratifiés par des primes mais aussi de pénalités en cas de dépassement des consommations. Dans les faits, l’opérateur d’efficacité énergétique s’engage sur un taux de réduction de consommation d’énergie chez un industriel. Si ces objectifs de performance énergétique industrielle ne sont pas atteints, il payera des pénalités. S’ils sont dépassés, les bénéfices sont répartis entre les deux parties (la répartition est à définie contractuellement en amont)

Quels sont les différents types de Contrats de Performance Energétique ?

Il existe 3 types de Contrat de Performance Énergétique :

  • CPE fournitures et services : Les travaux portent sur la fourniture d’équipements et la maintenance de ceux-ci tout le long de la durée de vie du CPE (exemples : équipements de production et de distribution d’énergie comme chaudières, pompes à chaleur, groupes frigorifiques).
  • CPE Travaux et services : Le CPE concerne la réalisation, l’exploitation et la maintenance de travaux d’isolation thermique, d’imperméabilisation, d’étanchéité… des bâtiments industriels.
  • CPE globaux : Ce type de CPE englobe les deux premiers types de CPE.

A noter qu’il est préférable de contracter un ou plusieurs CPE par site industriel plutôt que de signer un CPE pour plusieurs sites.

Performance énergétique : industriels, pensez aux CEE

Pour toujours plus améliorer la performance énergétique des industriels et les inciter à se tourner vers les CPE, une nouvelle fiche CEE standardisée a vu le jour en 2019. Intitulée « Système de mesurage d’indicateurs de performance énergétique » et référencé sous IND-UT-134, elle aide à financer l’installation d’un système de mesurage d’indicateurs de performance énergétique, condition d’un CPE réussi.

La mise en place d’un tel système permet :

  • De mesurer, relever et conserver toutes les données nécessaires au calcul des indicateurs de performance énergétique (IPE) ;
  • De réaliser un suivi des IPE grâce à un logiciel de gestion énergétique ;
  • D’alerter les utilisateurs lors du dépassement des seuils fixés.

Si ces investissements garantissent une baisse des dépenses d’énergie et une meilleure compétitivité, ils n’en restent pas moins importants : les certificats d’économie d’énergie obtenus soulagent les entreprises dans le financement des compteurs et du logiciel de gestion de l’énergie. Par ailleurs, le mesurage des Indicateurs de performance énergétique répond aux exigences du management de l’énergie, ce qui permet aux industriels concernés de briguer la norme ISO 50 001.

Quels sont les Indicateurs de performances éligibles ?

Les appareils de mesure installés doivent permettre de recueillir les informations suivantes :

  • Le rendement du procédé industriel thermique ou électrique ;
  • Le rendement de la production et/ou distribution de chaleur ;
  • La consommation d’énergie spécifique liée à la production et/ou distribution d’air comprimé ;
  • Le coefficient de performance de la production et/ou distribution de froid ;
  • Le rendement des autres systèmes motorisés (pompes, ventilateurs, broyeurs…).

Pour les mesures concernant le procédé thermique ou électrique, les données peuvent être délivrées sur une journée. Pour les autres usages, la collecte des données doit s’effectuer à un pas de temps inférieur ou égal à dix minutes.

Attention, les systèmes de mesurage mis en place sur les équipements de secours ne sont pas éligibles à l’opération.

Charlotte Martin
Responsable Communication

Sophie-Charlotte MARTIN, Conceptrice-Rédactrice spécialisée

Titulaire d'un master 2 en Lettres Classiques, complété d'un master 2 en Communication et d'un cycle web marketing à la CCI de Lyon, Sophie-Charlotte est intervenue sur des sujets aussi B2C que B2B, on et off line.

Régulièrement confrontée aux problématiques tertiaires et industrielles, elle s'est spécialisée en énergie. Aujourd'hui, elle garantit au quotidien la direction et la production éditoriale de l'entreprise. Sophie-Charlotte MARTIN est Responsable éditoriale d'Opéra Energie.